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- Je n'ai pas le temps de boire aujourd'hui Thémus.
- Je m'en doute. Mais nous serons plus tranquilles pour discuter.
Après avoir vaguement marmonné son accord, Elland le suit jusqu'à l'arrière-boutique et s'installe sur une chaise. Puis, sans perdre de temps, pressé d'en finir, il déballe les bijoux volés. Thémus, indifférent, se sert tout de même un verre, tout en lui annonçant :
- D'après mes informateurs, ta logeuse a vendu tes affaires à des marchands ambulants. Ils ont quitté la ville hier au soir, juste avant que les portes de la ville ne soient fermées pour la nuit. Ils se dirigent actuellement vers Fiermont. Mais leur convoi est bien gardé, ils ont engagé des mercenaires...
- Comment es-tu au courant ?
Le sang du voleur s'est glacé dans ses veines, et il imagine, horrifié, être l'objet de rumeurs et de moqueries dans tous les bas-quartiers de la ville. Mais le cordonnier l'apaise d'un geste de la main, et lui sourit :
- Personne n'est au courant, c'est Ménandre qui est venu m'en parler ce matin. Je me suis permis de mener ma petite enquête, rien de plus. Ne t'inquiète pas, ça ne s'ébruitera pas.
Encore ce gamin ! Il n'a pas dormi longtemps mais ça a suffit à Pèire et Ménandre pour manigancer ... Mais c'est la reconnaissance qui prédomine sur la colère, et la gorge nouée par l'émotion, Elland est incapable de répondre quoique ce soit. Pèire, Ménandre et Thémus l'aident encore, et ça le surprendra toujours. Avisant le trouble de son hôte, le cordonnier se relève et lui remplit un gobelet d'hydromel. Et c'est avec avidité qu'Elland en boit une bonne moitié. Thémus est allé chercher une bourse rebondie dans l'un des nombreux placards qui tapissent les murs. Jouant machinalement avec l'escarcelle, il poursuit :
- Comme je te le disais, l'attaque des marchands ambulants est périlleuse, et risque d'attirer l'attention sur nous. Mais si tu le souhaites, il te suffit de m'en toucher un mot, et cette attaque se fera.
- Non, je me débrouillerai.
Savoir que ses affaires sont entre les mains de marchands ambulants lui a ôté tout espoir. Jamais plus il ne les retrouvera. Et s'il sait bien que Thémus récupérera toutes les autres affaires volées dans l'attaque du convoi et qu'il ne sera donc pas perdant dans l'histoire, il ne souhaite pas pour autant l'impliquer davantage. Thémus poursuit, imperturbable :
- De toutes façons, j'ai une autre solution à te proposer. Une connaissance est allée rendre visite à ta logeuse. Elle t'adresse ses plus sincères excuses, et elle a décidé de te rendre la valeur des biens vendus.
Le regard du voleur se vrille dans les prunelles de son vis-à-vis, cherchant à percevoir la vérité derrière ces faits enjolivés. Elle aurait rendu l'argent de son plein gré ? Sans hésiter ? Sans essayer de l'arnaquer ? Le sourire carnassier de Thémus lui répond par la négative.
- Merci beaucoup Thémus. C'est …
- C'est normal. Elle n'avait pas le droit de profiter de la situation. Donc cette bourse est à toi. Elle te permettra de remplacer la plupart de tes affaires.
- Et les bijoux alors ?
- Je vais te les prendre. Et te les payer d'avance, pour que tu aies de quoi voir venir.
- Merci beaucoup.
- Tu commences à radoter...
Le sourire du cordonnier se fait chaleureux, et il lui glisse dans la main la bourse de sa logeuse. Puis, avec toute la minutie des professionnels, il examine soigneusement chaque pièce apportée par Elland. Hochant la tête devant la qualité des objets, il marmonne des chiffres, puis se lève et va fouiller dans un autre placard. Enfin, il revient et dépose un joli tas de monnaie devant le voleur.
- Voilà pour toi. Ah, et au fait ! Tu sais, au lieu de donner ton argent à un logeur peu scrupuleux qui t'arnaquera dès que tu auras le dos tourné, tu aurais meilleur compte à accepter l'offre de Pèire. Et puis, tu sais, sa taverne vient juste d'ouvrir, il dormirait sans doute plus facilement avec l'assurance d'avoir un loyer régulier, même si ce n'est qu'une partie de ses revenus.
Les yeux plissés, Elland observe le cordonnier, qui garde un air détaché. Ils se sont ligués pour le convaincre de vivre à l'Hermine Affamée. Et ce satané bonhomme, en face de lui, sait parfaitement qu'en utilisant cet argument, il touche une corde sensible. Grognon, avec l'impression de s'être fait avoir, encore une fois, Elland empoche l'argent et se lève. Il marmonne un vague « J'y réfléchirai. Merci pour tout » et termine son verre. Le tintement de la clochette lui offre l'excuse idéale pour déguerpir, non sans avoir salué Thémus comme il se doit.
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Résumé :
Lorsque la licorne protectrice du royaume est assassinée, il ne reste plus rien pour défendre Setiladom des protégés du comte Zeldor de la Cité des Monts Damnés. Héribold, accusé à tort d’avoir occis l’animal, va finalement se voir confier la lourde tâche de ramener une autre de ces créatures sacrées à la citadelle.
Mon avis :
C'était un achat impulsif : j'ai été séduite par la couverture et par le résumé qui change un peu de l'ordinaire. Et ça m'apprendra à faire des achats impulsifs.
L'idée d'origine était bonne, je trouve : on apprend que la licorne est l'animal magique capable de défendre le royaume contre les méchants dragons qui veulent le raser. Là où le bât blesse, c'est pour tout le reste, quasiment.
Certains personnages ne sont visiblement là que pour servir le récit : la petite fille d'Héribold, par exemple, qui lance une expédition pour aller sauver son père, condamné à mort, au tout début du roman. Je ne vous spoile pas trop en disant que le père fini par être sauvé (trois pages plus loin). Il s'aperçoit bien que sa fille est là, mais, alors même qu'il déplorait le fait de ne pas l'avoir aimé suffisamment, il n'y a aucune mention de retrouvailles entre le père et sa fille. Et pas besoin de verser dans le sentimental guimauveux, il suffisait d'une allusion. Et ce travers, on le retrouve tout le long du récit. Certains personnages apparaissent clairement pour servir uniquement à l'avancée de la quête, et c'est tellement flagrant que ça en est énervant.
Et de plus, en terme de caractères, il y a de sérieuses incohérences. Héribold est en charge de la défense de la ville. Le grand chef donc. Et pendant la quête, à plusieurs reprises, l'auteur nous dit, grosso modo, qu'Héribold n'avait pas l'habitude de prendre des décisions qui pesaient si lourd sur le destin de sa cité. Hum. Et donc, en tant que chef des gardes ? Il faisait quoi ?
Un autre travers qui m'a agacé : la simplicité avec laquelle ils règlent les problèmes qu'ils rencontrent.
Pour l'un d'entre eux en particulier, des dizaines de chercheurs, des siècles durant, se sont cassé les dents sur une énigme insoluble, et eux, en quelques heures réussissent à percer le mystère. Les coïncidences sont vraiment trop grosses : le premier-venu qu'ils croisent peut systématiquement les aider.
Toute la quête est lancée sur une simple intuition, et si les personnages arrivent à se convaincre du danger, ce n'était pas mon cas.
Un autre détail qui m'a dérangé, c'est les ''copies'' du Seigneur des Anneaux. D'accord, le mot copie est un peu fort mais bon. Les personnages vont dans une auberge appelée Le Destrier Fringuant. Ils sont dans une tour, la plus haute du monde, et en son sommet, ils découvrent un immense globe rougeoyant. Alors qu'ils avancent plus au nord, il découvrent les Gardiens, deux statues immenses de guerriers jumeaux, qui annoncent l'entrée dans une terre. Ce n'est peut-être pas volontaire mais voilà, ça m'a fait tiquer.
La plume n'est pas désagréable à lire. Mais les personnages manquent de profondeur, de cohérence. Les difficultés rencontrées sont si vite résolues qu'on peine à adhérer à leur quête. La menace n'est pas franchement menaçante. Quant aux idées des ''scientifiques'', elles sont assez surprenantes d'immaturité.
J'admets que c'est un roman jeunesse. Mais nos chères têtes blondes méritent mieux. Une grosse déception, donc.
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L'image n'est pas à moi. Cliquez sur ce lien pour découvrir le blog de la dessinatrice : link
Son chez-lui, sa tanière, son refuge est totalement vide. Ses meubles, ses habits, ses quelques possessions ont disparus. Ne reste que la poussière et quelques toiles d'araignées. Fébrile, il se précipite vers ses cachettes : la troisième brique en partant du milieu, à hauteur d'épaule, est amovible. Et en la retirant, Elland découvre avec soulagement que ses trésors sont toujours là. A la hâte, il s'en empare, les fourre pêle-mêle dans son balluchon, puis se précipite vers son autre planque : la planche juste avant le seuil de la porte. Et là encore, son butin est intact. Dernière cachette, sur l'une des poutres de la charpente, creusée par ses soins. Oui ! Toujours là !
Dans un geste dérisoire, Elland serre précieusement son balluchon contre son torse, et tourne lentement sur lui-même au milieu de son appartement vide. Il n'y a définitivement rien d'autre à récupérer.
Incapable de rester plus longtemps entre ces murs, il se glisse par la lucarne, douloureusement conscient que c'est sans doute la dernière fois qu'il peut le faire. Puis, accroupi sur le toit mitoyen, il contemple la ville sans vraiment la voir, plongé dans ses pensées. Il n'a plus rien. Certes, il lui reste des bijoux volés, qu'il pourra revendre. Mais il n'a plus de refuge. Il n'a plus de meubles, ni le moindre objet de la vie courante. Ils lui ont volé sa vie.
Le regard fuyant de la vieille lui revient soudain en mémoire, et enfin, il met le doigt sur le détail qui le dérange. Les gardes n'emmènent rien d'habitude, si ce n'est le suspect. Et les connaissant, ils n'ont pas dû passer beaucoup de temps à fouiller, sinon, ils auraient trouver son butin. Ils cherchaient un coureur de jupons, capable de pervertir cette innocente femme. Ils ne cherchaient pas un voleur. D'accord, pour chez lui, ils ont dû se faire avoir par les pièges, mais ils ne s'amuseraient certainement pas à descendre les meubles, même par vengeance. Pour en faire quoi de toutes façons ? Ils n'ont pas trouvé de preuves, et c'est tout ce qu'ils cherchaient.
Par contre, sa logeuse... apprenant que son locataire ne reviendrait pas, elle a dû faire appel à des connaissances qui sont venues piller chez lui, poser leurs sales pattes sur ses affaires, et les emmener contre quelques pièces d'argent. Et la vieille peau s'est empressée de trouver un nouveau locataire, avant même de s'assurer qu'il était bien condamné.
Un cri de rage s'étrangle dans sa gorge. Qu'elle soit maudite ! Qu'elle brûle en Enfer !!
Mais la fureur s'efface rapidement alors qu'il observe sa main. Il ne peut plus plier complètement ses doigts et il en sent à peine les extrémités. Quant à saisir un objet et le porter, c'est devenu complètement aléatoire : parfois, il y parvient, parfois l'objet lui échappe, comme s'il était aussi glissant qu'un poisson dans une rivière. Pourra-t-il seulement reprendre ses activités comme avant ?
L'arrivée d'Echidna interrompt le cours de ses pensées. Avec tendresse, elle vient frotter son museau contre épaule, et il réalise, hébété, que la nuit est déjà tombée depuis longtemps. Sa gargouille s'assoit tout contre lui, et il fait reposer son front contre sa peau rugueuse. Elle n'a pas besoin de lui parler pour le réconforter. Sa simple présence suffit à lui remonter le moral : il n'a peut-être plus grand chose, mais il l'a, elle. Et c'est bien le plus important. Pourtant, bien malgré lui, ses pensées dérivent et il fait une liste des objets qu'il a perdu. Il sait bien qu'il est inutile d'aller parler avec sa logeuse : même si elle lui disait à qui elle a vendu ses possessions, il ne pourrait jamais les récupérer. Et même si ça lui revient de droit … il est fatigué de lutter.
D'un mouvement doux et pourtant ferme, Echidna suspend ses réflexions et l'invite à grimper sur son dos. Il rechigne et bougonne, satisfait de se lamenter sur son sort. Mais il comprend rapidement : s'il est toujours là quand le soleil se lèvera, il sera coincé sur le toit. Le goujat qui occupera sa tanière empêchera tout passage par la lucarne et il serait suicidaire de redescendre par la façade. Seulement, dans sa situation, il a juste envie de rester là et d'attendre que ça se passe. Echidna se fait insistante, et il s'exécute. Son baluchon solidement noué autour de la taille, il passe les bras autour de son cou. D'un mouvement puissant, elle prend son envol et s'élève au dessus des toits. L'excitation habituelle du vol, voire la nausée, n'arrivent pas. Il reste totalement amorphe malgré les efforts de la gargouille pour lui procurer des sensations. Ils survolent les toits tellement bas que quelques tuiles se détachent et vont s'écraser bruyamment sur les pavés. Et ils frôlent la Grand Tour Célestis de si près qu'Elland manque d'être jeté à terre. Mais rien. Pas la moindre nausée, pas la moindre peur. Il se sent aussi vide que son appartement.
Echidna s'éloigne peu à peu de la ville, jusqu'à survoler les bois environnants. Lorsqu'elle se pose souplement sur le sol humide, il est assailli par l'odeur d'humus qui lui rappelle son séjour à la cascade. Les lieux sont sinistres, à peines éclairés par l'astre nocturne. De sa démarche si particulière, Echidna l'entraîne jusqu'à un monticule de rochers et le désigne d'un large mouvement de la tête. Il la regarde un moment sans comprendre, et soudain, tout s'éclaire : puisqu'il n'a plus de refuge, il doit dissimuler une partie de son butin ici. A l'aide d'une pierre tranchante, il creuse un trou profond et se défait d'une chemise, dans laquelle il plie soigneusement les bijoux des Clamadinis : ce sont les plus dangereux, et plus compromettants. Il ne garde que le médaillon où la femme lui sourit, ainsi que des bijoux plus anonymes. Demain, il ira voir Thémus pour se faire un peu d'argent. Immobile, les genoux sur la terre fraîchement remuée, il a l'impression d'enterrer sa vie.
C'est Echidna, encore, qui le tire de ses pensées moroses. Réalisant que la nuit vieillit, il agit. Ses biens soigneusement recouverts de terre, de cailloux et de feuilles, il remonte sur le dos d'Echidna. L'aube fait pâlir le ciel, il est temps de rentrer. Et si Elland ignore où aller pour dormir, sa complice n'hésite pas. En quelques minutes, ils se retrouvent dans la petite ruelle derrière l'Hermine Affamée.
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Résumé :
En l'an 31, l'empereur Tibère, désabusé et las des intrigues de Rome, se retire à Capri.
Une fin de règne délétère commence, sur laquelle plane l'ombre du terrible Séjan, préfet du prétoire, à qui l'empereur a confié le pouvoir, et dont l'ambition est sans limites ... Personne n'ose s'opposer à ses hommes de main. Personne? C'est oublier Kaeso, jeune centurion du corps des prétoriens impériaux, une tête brûlée, qui a le courage de s'insurger. Expédié à Pompéi comme chef de la police, il y découvre un climat de tourmente et plonge dans l'œil du cyclone.
Devant l'urgence, Kaeso se lance à corps perdu dans une enquête serrée et tente de déjouer un complot qui pourrait bien viser l'héritier du trône, un certain Caligula. Le jeune homme a heureusement de précieux alliés : Io, son fidèle léopard ; les gardes germaniques - ses frères d'armes; Hildr, sa mère, guérisseuse le jour et magicienne la nuit ; et enfin sa propre cousine, la ravissante Concordia, très bien informée des secrets de la Cour...Mon avis :
C'est un peu par hasard, au gré de mes pérégrinations sur le net, que j'ai découvert cet auteur. Et je ne le regrette pas du tout.
Cristina Rodriguez est romancière mais également historienne, spécialiste de l'antiquité Gréco-Romaine. Et de ce fait, la plongée dans la Rome Antique est parfaitement plausible, sans incohérences et historiquement exacte. Elle place ses fictions dans cet univers avec brio, faisant renaître sous nos yeux une époque pas forcément très bien connue, tout en restant à la portée de chacun. C'est bel et bien une fiction que nous avons devant nous, pas un cours magistral, et c'est nettement plus intéressant.
L'intrigue est très bien menée, les événement s'enchaînent sans temps morts, avec cohérence. Les mystères s'accumulent sans répit jusqu'au dénouement final, particulièrement surprenant.
J'aime beaucoup les personnages qu'elle a créé : il ont tous une réelle personnalité, une profondeur qui ne peut que nous toucher. Kaseo et ses blessures du passé, qui se retrouve dans une Pompéi « calme, où il ne se passe jamais rien », et qui découvre une police aussi incompétente qu'inefficace. Il s'avère qu'à peine arrivé, il est confronté une série de meurtres et d'évènements étranges. On comprend parfaitement son désarroi, et on tourne les pages en espérant que tout s'arrangera.
Il y a toute une galerie de personnages qui gravitent autour de lui et qui rendent ce récit vraiment prenant.
L'auteur fait preuve de beaucoup d'humour également : Concordia, piètre cuisinière, veut pourtant préparer le dîner à la Caserne... et verse dans le plat assez de piment pour assaisonner les plats de toute la ville. Kaseo est tout de suite appelé auprès de ses hommes qui se ruent vers le puits. Découragé, il pense que la situation ne pourrait pas être pire. Et la première phrase du chapitre suivant est : « Elle a mis le feu à la caserne ».
Une plume très agréable à lire, un récit fluide et prenant, une intrigue bien menée, et des personnages vraiment touchants : j'ai vraiment aimé cette lecture !
Bon à savoir : Kaseo revient pour une autre enquête dans le livre Meurtres sur le Palatin. Livre que j'ai lu avant celui-là (forcément) mais qui est tout aussi intéressant !
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Résumé :
Hiver 1953, Moscou.
Le corps d'un petit garçon est retrouvé sur une voie ferrée.
Agent du MGB, la police d'État chargée du contre-espionnage, Leo est un officier particulièrement zélé. Alors que la famille de l'enfant croit à un assassinat, lui reste fidèle à la ligne du parti : le crime n'existe pas dans le parfait État socialiste, il s'agit d'un accident. L'affaire est classée mais le doute s'installe dans l'esprit de Leo.Tombé en disgrâce, soupçonné de trahison, Leo est contraint à l'exil avec sa femme Raïssa, elle-même convaincue de dissidence. C'est là, dans une petite ville perdue des montagnes de l'Oural, qu'il va faire une troublante découverte : un autre enfant mort dans les mêmes conditions que l'« accident » de Moscou.
Prenant tous les risques, Leo et Raïssa vont se lancer dans une terrible traque, qui fera d'eux des ennemis du peuple...
Mon avis :
Le gros point fort de ce roman, c'est l'univers. L'auteur a su parfaitement retranscrire cette sombre période de l'histoire. C'est une chose de connaître les dates auxquelles Staline a été au pouvoir, de connaître ce qu'il s'est passé, c'en est une autre de plonger dans ce contexte et de suivre la vie quotidienne.
C'est donc dans un climat de famine que s'ouvre le roman. Dès les premières pages, les évocations sont très fortes et m'ont noué la gorge. Les faits sont énoncés simplement, sans sur-jouer, et n'en sont que plus difficiles. Puis, viennent la paranoïa et la terreur. L'omniprésence du gouvernement, les arrestations arbitraires, la délation, tout est évoqué sans concession.
Au milieu, nous avons les personnages, qui survivent tant bien que mal. Ici encore, pas de concessions : ce sont des personnages durs, froids comme le climat, totalement dénués de la moindre naïveté. La paranoïa, la moindre action savament réfléchie pour ne pas attirer l'attention. Mais pourtant, l'auteur parvient à les rendre attachants : ils luttent envers et contre tout, au péril de leur vie, pour trouver cet assassin d'enfants. Alors que le gouvernement, qui se targue d'avoir éradiqué toute criminalité, se contente de coupables "faciles", là un handicapé mental, ici un marginal. Qu'importe, la théorie du serial killer n'est tout simplement pas acceptable.
L'intrigue policière en elle-même n'est pas très développée. Trouver le meurtrier est presque « facile » mais ce n'est pas ce qui compte réellement, tant nous voulons la survie des héros.
C'est un livre très fort, très marquant. L'auteur a parfaitement intégré son récit dans la réalité historique de l'époque, et c'est là toute la force du roman à mon avis. A lire !
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