• Pardonnez-nos-offenses.gif

     

     

    Résumé :

     

    Hiver 1284.
    Les " froidures du Diable " accablent Draguan, petit diocèse du comté de Toulouse. La population est en proie aux peurs les plus irraisonnées depuis la découverte macabre de restes de corps suppliciés dans la rivière... Henno Gui, prêtre aux manières étranges, est mandé pour prendre en charge la paroisse d'Heurteloup. Enfoui dans une forêt inextricable, entouré de marais nauséabonds, Heurteloup vit dans l'oubli depuis des décennies.
    L'église est en ruine, les maisons à l'abandon. Nul ne sait ce que les habitants sont devenus... Cette paroisse maudite intéresse pourtant les plus hautes sphères de Rome :un terrible secret semble avoir présidé à la " disparition " du village.

     

    J'ai aimé

     

    Mon avis :

     

    Je ne connaissais pas Romain Sardou en tant qu'auteur. Le résumé m'a intrigué, alors je me suis laissée tenter.

     

    Et je n'ai aucun regret. S'il serait facile d'accuser l'auteur d'être uniquement un « fils de » qui profite de la notoriété paternelle pour se faire une place au soleil, personne ne peut prétendre une telle chose après la lecture de ce roman.

     

    Car l'auteur nous offre un récit très réaliste, aux phrases et au vocabulaire recherchés, parfaitement cohérent avec l'époque et extrêmement bien construit.

     

    En quelques lignes, nous plongeons dans cette paroisse médiévale. Tous les éléments sont présents pour que l'atmosphère soit sombre et dure, comme à cette époque. A mesure qu'avancent les différents éléments de l'intrigue, l'auteur nous fait réfléchir.

     

    Heurteloup, coupé du monde depuis des décennies. Les habitants parlent un langage différent, vénèrent des dieux différents. Faire un parallèle avec notre époque semble bien compliqué, nous qui sommes reliés, en permanence, au reste du monde. Comment peut-on oublier la présence d'un village à quelques kilomètres de nous ? Comment une micro-société peut-elle perdre à ce point son identité à la mort des ancêtres du village ? Plus de souvenirs, plus de passé dès que les mémoires les plus anciennes s'éteignent. Et pourtant, ces hommes et ces femmes se réfèrent à une puissance supérieure, comme si chaque homme se devait de croire en un Dieu pour trouver sa place. Pourquoi n'avons-nous plus ce besoin, aujourd'hui ?

    Ces questions m'ont turlupiné pendant la lecture. Alors même que nous voulons croire que tout est éternel, ce genre d'évènements nous rappelle qu'il suffit de deux générations pour qu'énormément de connaissances se perdent.

     

    Et puis, bien sûr, il y a la question de la religion. Difficile d'y couper, à cette période de l'histoire. Et même s'il serait bien naïf de croire que l'Eglise n'a rien à se reprocher, même si les évènements rapportés ne sont pas historiques, c'est assez impressionnant de lire la manière dont les hommes de foi ont manigancé pour remettre une personne dans le droit chemin, pour faire croire aux miracles ou encore, pour établir la toute-puissance de l'église.

     

    Les personnages sont attachants, chacun avec leur personnalité propre et leurs petits travers. L'histoire est menée tambour battant et réserve bien des surprises. Certains passages sont plutôt difficiles à lire, car ils décrivent assez précisément des scènes sordides. Mais encore une fois, c'est parfaitement cohérent et l'auteur ne les place pas ici pour le plaisir de déranger, mais bien parce qu'elles ont leur place dans le récit.

     

    La fin est à l'image du récit : dure et sombre. Mais Romain Sardou n'avait guère d'autre possibilité et un « ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants » aurait semblé parfaitement inadapté.

     

    Ce livre est une vraie découverte. J'ai beaucoup aimé la plume de l'auteur et l'univers qu'il nous dépeint. Quant aux intrigues, elles sont particulièrement bien menées. Un seul petit regret : j'aurais bien aimé avoir le temps de mieux connaître les différents protagonistes de l'histoire.

     

     

    Un grand coup de cœur pour ce récit !


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  • Pleine lune sur Wyzima

     

    L'aube n'est pas levée depuis bien longtemps, mais le soleil brûle déjà la ville, comme décidé à la rôtir avant la fin de la journée. Les habitants se pressent dans les rues, profitant de la chaleur encore supportable pour vaquer à leurs occupations. Dans quelques heures, lorsque le soleil s'acharnera sur la ville, ils se réfugieront tous à l'abri des toits d'ardoise. Thémus est déjà sur le pied de guerre quand ils entrent dans sa boutique. Mais point de rendez-vous secrets ou d'accords discrets. Assis sur un tabouret haut, il assène régulièrement de puissants coups de marteau sur une bande de cuir qui deviendra bientôt une ceinture. Il les salue d'un geste de la tête mais poursuit son ouvrage. Pèire et Elland, fascinés par ses gestes, patientent sans rechigner. Lorsque le dernier coup est porté, Thémus se redresse, et s'approche d'eux.

    Il ne dit rien à Elland, bien que son regard soulagé prouve au voleur que son absence ne l'a pas laissé sans inquiétude. Puis, d'un geste large, il les invite à passer dans l'arrière-boutique. Il est encore trop tôt pour l'hydromel, aussi le colosse se contente-t-il de leur proposer du vin coupé à l'eau.

    Elland lui résume rapidement la situation et ses conclusions. Comme il s'y attendait, la moustache du cordonnier frémit de rage. Et pourtant, Thémus ne dit rien, ne blasphème pas et ne promet pas une mort lente et douloureuse pour ses hommes si peu fiables. Peut-être comprend-il leurs motivations. Ou peut-être attend-il le départ des deux amis pour laisser libre cours à sa colère. Pèire lui explique également que Théoliste ne les rejoindra pas aujourd'hui, et résume en quelques phrases l'étrange énergumène qu'Elland a ramené à la taverne.

    Thémus affiche un air poli, mais il semble évident qu'il n'a qu'une seule envie : aller trouver ces portes dérobées. Ils ne palabrent donc pas plus que nécessaire et se rendent rapidement au premier appartement. Après un passage rapide vers l'homme qui surveille les lieux et qui leur promet, sur tout ce qu'il a de plus cher, que personne n'est entré depuis la veille, ils pénètrent dans l'immeuble.

    Effectivement, l'appartement est désert. Rien n'a bougé depuis la dernière fois qu'ils y sont rentrés. Mais ce n'est plus ce qui les intéresse. Ils examinent les lieux avec un nouvel œil, sans rien trouver d'intéressant. Elland se glisse à travers la fenêtre qui donne sur la cour intérieure et cherche longuement une seconde issue, en vain. Les murs hauts de la cour sont tous percés de fenêtres mais aucune porte. Et toutes les autres fenêtres du rez-de-chaussé sont sécurisées par d'épais barreaux. Personne ne peut passer par là. Quant aux fenêtres du premier étage, elles sont inaccessibles : Elland a beaucoup pratiqué l'escalade des façades quand il le pouvait encore, et celle-là est bien trop lisse pour permettre ce genre d'activité. La seule issue possible est le regard au milieu de la cour. Destiné à recueillir l'eau de pluie, ce trou dans le sol la mène directement dans les égoûts de la ville. Mais pour éviter que les détritus ne bouchent les canalisations, le regard est scellé par une petite grille fine. Et de toute façon, aucun homme ne pourrait s'y faufiler.

    Dépité, Elland regagne l'appartement, passant à nouveau par la fenêtre. Thémus est monté dans les étages, pour s'assurer qu'aucun appartement ne communique avec un autre immeuble. Et redescendu, bredouille. Pèire, lui, avec une patience infinie, sonde les murs à la recherche d'une porte cachée. Et lorsqu'ils se retrouvent tous les trois dans l'appartement désert, ils sont bien obligés de s'avouer vaincus. Aucune trace d'une quelconque sortie discrète.

    - Logiquement, s'ils veulent être discrets, la porte dérobée se trouve dans l'appartement, pas dans la cour ou dans un autre logement. Comme ça, personne ne peut surprendre leurs allées et venues.
    - Mais il n'y a aucune porte cachée dans les murs.
    - Et au sol ?

    Aussitôt, avec frénésie, ils observent les lieux. Le tapis semble être trop évident pour dissimuler une trappe. Alors Thémus et Pèire unissent leurs forces pour pousser la lourde malle. Ils sont en sueur et à bout de souffle lorsque cette satanée malle est enfin déplacée. Mais il n'y a rien dessous. Un peu de poussière, peut-être, et un minuscule trou de souris. Mais rien qui permettrait à un homme d'entrer ou de sortir.
    Alors Elland roule le tapis. Leur dernière chance. La bonne. Une trappe se dessine sur le plancher, et seul une petite ouverture permet d'y glisser un doigt. Ce qu'Elland fait, sans perdre une seconde.

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  • Lame-Damnee.gif

     

     

    Résumé :

     

    1407.
    Venise est à son apogée. Le duc Marco est aux commandes... en théorie, car il est niais et son oncle et sa tante gouvernent à sa place. Ils règnent sur les mers, dictent les lois et semblent tout-puissants. Même s'ils craignent des assassins meilleurs que les leurs... Une nuit, tout bascule. La cousine du duc, qui devait être mariée de force, est enlevée par des pirates mamelouks. La guerre est inévitable.
    Au même moment, Atilo, l'assassin en chef de Marco, tranche la gorge de sa dernière victime. Il s'apprête à rebrousser chemin, mais aperçoit un garçon penché sur le mourant, en train de boire à sa plaie. Il est beau comme un ange, d'une maigreur terrifiante, et la vitesse à laquelle il esquive un poignard et escalade un mur stupéfie Atilo. Le maître assassin sait qu'il doit à tout prix trouver le garçon.
    Non pour le tuer, mais pour en faire son apprenti...

     

    Dead

     

    Mon avis :

     

    Ce livre avait tout pour me plaire : une histoire d'assassins, une ville grouillant de complots, un vampire. Et c'est peut-être à cause de ces nombreux éléments que je suis tant déçue.

     

    La plume de l'auteur est plutôt sympathique, c'est vrai. Même si parfois, il utilise des raccourcis qui m'ont perdue. Par contre, l'un de ses tics d'écriture m'a particulièrement agacée : sa manière de décrire les femmes. Systématiquement, il fait référence à leur poitrine, qui semble presque toujours vouloir s'échapper du corsage de ladite madame. Les seins, et les hanches, donc. A croire qu'une femme se résume à ça. Autre point récurent, les références à l'urine et matière fécale. D'accord, d'accord, les personnages sont humains et doivent aller se soulager régulièrement. Ce n'est pas pour autant la peine de nous décrire tout ça dans le détails.

     

    D'autant que ce sont quasiment les seuls points sur lesquels l'auteur insiste. La politique est certes abordée, et je ne me plaindrais pas qu'elle ne soit pas tant développée, mais finalement, les intrigues et autres complots restent relativement sommaires.

    Les personnages, surtout secondaires, sont rapidement effleurés. Même les personnages principaux semblent creux. Le chef des assassins, donc, qui n'est quasiment jamais en action. D'ailleurs, depuis quelques temps, il n'a plus d'assassins, tous tués lors d'une confrontation avec les loups-garous. (Et j'ai pas très bien compris d'où il les sort, ces loups-garous). De même, le vampire ne sait pas qu'il est vampire. Et fait très pratique, il perd la mémoire plus rapidement que le moins malin des poissons rouges. Ça l'intrigue quand même un peu de ne pas manger, mais sans plus. L'auteur, s'il esquisse des traits originaux de ces personnages mythiques, se contente précisément d'esquisser. Et nous laisse avec une désagréable impression d'inachevé.

     

    Enfin, il y a des soucis de cohérence qui m'ont prodigieusement agacés. Comme le fait que le garçon en question, qui a une peur bleue de l'eau, ne la supporte pas, même sur un bateau, ce même garçon donc prend soudain le gouvernail du rafiot en perdition pour les mener miraculeusement en sécurité. Normal, quoi.

     

    Au final, j'ai réussi à terminer ce roman. Et il m'en reste un sentiment plus que mitigé. A trop vouloir aborder des sujets phares des tendances littéraires, l'auteur perd ses lecteurs. Les fans de vampires et autres loups-garous ne peuvent sortir que désappointés de cette histoire. Les amateurs de complots et autres assassins ne peuvent être que frustrés du traitement trop rapide.

    Il survole bien trop les sujets pour qu'on s'implique dans son histoire. La suite des aventures d'Atilo se fera sans moi.


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  • Robin.gif

     

     

    Résumé :

     

    XIe siècle, Angleterre.
    Depuis l’arrivée des envahisseurs normands, les Celtes ont été repoussés dans les montagnes du pays de Galles. Traqué comme un animal, Bran ap Brychan, héritier du trône d’Elfael, a été contraint d’abandonner le royaume de son père pour se réfugier dans la forêt des Marches, des bois primitifs où le danger rôde…

     

    Pas convaincue

     

    Mon avis :

     

    Pfou...

    J'avais lu, du même auteur, le cycle de Pendragon, et j'en garde un bon souvenir. J'espérais, avec ce nouvel opus, revisiter le mythe.

    Sauf que voilà. Ça n'a pas vraiment pris.

     

    La plume de l'auteur est toujours aussi agréable à lire, c'est un fait. Si les personnages ne sont pas toujours sympathiques, ce n'est qu'un bonus. J'ai retrouvé avec joie certains personnages qu'on connait tous, tels que frère Tuck.

     

    Oui mais voilà. Le résumé est mal fichu. Ou alors, c'est moi qui en veut aux résumés, je ne sais plus trop. Quoiqu'il en soit, on s'attend, à la lecture du résumé, à lire la vie de Bran Ap Brychan lorsqu'il s'est réfugié dans la fameuse forêt des Marches. Mais il n'en est rien. En réalité, ce passage se situe quasiment à la fin.

    J'ai donc passé le roman à attendre ce moment qui n'arrivait pas. Forcément, lorsque l'auteur parle des autres personnages, de leurs agissements et de leurs complots, on trouve le temps un peu long.

     

    Il y a du bon, bien sûr, j'ai aimé la manière dont la rumeur et la peur se répandent sur la région à l'annonce d'un être mystérieux et fantastique qui tue les imprudents qui s'aventurent dans la forêt. Mais très honnêtement, j'ai trouvé le temps long. Et j'ai fermé le roman avec le soulagement de l'avoir enfin terminé.

    Peut-être que si je ne m'étais pas seulement arrêtée au résumé, j'aurais plus aimé. Peut-être que si je n'étais pas partie avec mes préjugés, j'aurais plus apprécié. Peut-être.


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  •  

    Enfer

     

    Elland se contente de hocher doucement la tête. Bien sûr que Thémus serait furieux, et il comprend ces hommes qui, s'ils en parlent entre eux, se gardent bien d'en parler à leur chef. Mais Thémus sera encore plus furieux d'apprendre qu'ils lui ont caché un élément si important. Car cette information pourrait bien s'avérer capitale.

    Echidna vient de voir les hommes disparaître dans un bâtiment, et aussitôt, Elland sait qu'il s'agit de la demeure de Tanorède Guevois. Il demande à Echidna de revenir le chercher, il doit partager certaines données avec les autres. Cilas s'est pris la tête entre les mains : il regrette visiblement d'avoir parlé. Elland déclare, d'une voix douce :


    - Je suis obligé d'en parler avec Thémus. Mais je glisserai un mot à ton sujet pour qu'il soit plus clément.

    Seul un gémissement désespéré lui répond. A dire vrai, Elland comprend parfaitement sa réaction, c'est difficile de lui en vouloir. Mais s'ils avaient su plus tôt...
    Echidna est déjà de retour. Le voleur ne s'attarde pas plus que nécessaire. Il ne leur faut qu'une poignée de battements d'ailes pour regagner l'Hermine Affamée.

    La gargouille se pose sur le toit, fière d'elle-même et de son coéquipier. Elland se faufile à travers la lucarne, s'arrête quelques minutes dans son repaire puis dévale les escaliers.
    La taverne, même en cette heure matinale, s'éveille doucement. Le dragon a réintégré sa cuisine et malgré une délicieuse odeur de pain chaud, Elland hésite à s'y aventurer.

    La cuisinière bougonne, puis finit par lâcher :


    - Sers-toi. Sinon, tu reviendras piquer dans mon dos, je te connais.

    Légèrement rougissant, Elland s’exécute en la remerciant. Les bras chargés de pain chaud, de beurre, de confiture et de miel, il se rend dans la salle principale. Pèire et Théoliste sont déjà là et déjeunent en parlant à voix basse. Le soulagement et la joie de Théoliste sont clairement visibles lorsqu'il aperçoit Elland. Il se lève brusquement, termine sa bouchée, et se précipite vers le voleur pour le serrer dans ses bras, laissant tout juste le temps au voleur de déposer ses victuailles. Un sourire attendri marque le visage d'Elland, qui lui rend son accolade avec plaisir. Puis, comme une mère qui retrouverait son enfant après une longue absence, le guérisseur s'écarte légèrement d'Elland et l'observe attentivement. Du bout des doigts, il effleure la fine cicatrice blanche qui orne la joue d'Elland. Puis, avec un large sourire et une tape dans le dos, il souhaite la bienvenue au voleur. Ils passent enfin aux choses sérieuses en dévorant leur petit-déjeuner, tandis que Théoliste déclare :

    - Pèire m'a raconté ton escapade. C'est très impressionnant. J'ai vraiment hâte de rencontrer cette Jehanne. Elle doit être fascinante.
    - Fascinante ? Sans doute, oui. Après tout, c'est la créatrice des gargouilles. Mais son discours n'est pas vraiment clair.
    - Bah ! Ça sera un défi à relever, que de la comprendre.
    - Et pas des moindres. Mais je voudrais vous parler d'autre chose.

    Pèire a suivi attentivement l'échange entre Elland et le guérisseur. Ses yeux se mettent à briller d'espoir et il presse le voleur de leur raconter ce qu'il a découvert. Sans se faire prier d'avantage, Elland raconte :

    - Les hommes de Thémus ne lui disent pas tout. Apparemment, il est arrivé plusieurs fois que ceux qu'ils surveillaient sortent d'un immeuble sans que quiconque ne les ait vu rentrer.
    - Tu penses qu'il y a une autre porte dissimulée dans les immeubles ?
    - J'en suis persuadé. Nous nous sommes concentrés sur le contenu de l'appartement, ou plutôt sur l'absence de contenu. Et nous n'avons pas pensé à vérifier qu'il n'y ait pas d'autre issue plus discrète. Mais ça serait parfaitement logique : ils veulent à tout prix être discrets et le principe de double entrée est presque évident.

    Théoliste et Pèire hochent la tête, approuvant la théorie d'Elland. A vrai dire, ils manquent tellement de théories qu'ils seraient prêts à accepter toute idée pourvu qu'elle tienne un minimum la route. Ils conviennent ensemble qu'il serait judicieux d'aller en parler à Thémus avant de faire quoique ce soit, au risque de le rendre plus furieux encore. Et puis, il s'implique tellement dans cette enquête qu'il serait injuste de le laisser de côté. Mais un problème se pose, et un problème de taille : que faire de Jehanne pendant qu'ils enquêtent ? L'emmener avec eux comporte de trop gros risques, elle ne passe pas inaperçue et risque de les déranger plus qu'autre chose. Et la laisser là, toute seule, ce n'est pas non plus sans danger. C'est finalement Théoliste qui propose de rester avec elle pour parler de potions de guérissons et de créations de gargouilles, persuadé qu'il pourrait apprendre énormément de choses. Sans trop oser casser ses illusions, Pèire et Elland approuvent, bien trop heureux d'avoir trouvé une solution qui convienne à tout le monde.
    Ils se préparent en quelques minutes et laissent le guérisseur à la taverne. Puis ils se mettent en route pour la cordonnerie de Thémus.

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  • Parle-leur-de-batailles--de-roi-et-d-elephants.gif

     

     

    Résumé :

     

    En débarquant à Constantinople le 13 mai 1506, Michel-Ange sait qu'il brave la puissance et la colère de Jules II, pape guerrier et mauvais payeur, dont il a laissé en chantier l'édification du tombeau, à Rome.
    Mais comment ne pas répondre à l'invitation du sultan Bajazet qui lui propose - après avoir refusé les plans de Léonard de Vinci - de concevoir un pont sur la Corne d'Or ? Ainsi commence ce roman, tout en frôlements historiques, qui s'empare d'un fait exact pour déployer les mystères de ce voyage. Troublant comme la rencontre de l'homme de la Renaissance avec les beautés du monde ottoman, précis et ciselé comme une pièce d'orfèvrerie, ce portrait de l'artiste au travail est aussi une fascinante réflexion sur l'acte de créer et sur le symbole d'un geste inachevé vers l'autre rive de la civilisation.

     

     

    Perplexe

     

    Mon avis :

     

    Cette fois-ci, c'est le titre qui m'a décidé. Je le trouvais très beau, et le résumé m'a convaincu.

    Après, et bien, après, il y a cet extrait emprunté au livre de Rudyard Kipling, Au hasard de la vie , repris dans le livre de Mathias Enard : «Puisque ce sont des enfants, parle-leur de batailles et de rois, de chevaux, de diables, d’éléphants et d’anges, mais n’omets pas de leur parler d’amour et de choses semblables. »

     

     

    L'auteur utilise donc une période de flou historique pour prêter à Michel-Ange cet extra-ordinaire voyage à Istanbul. C'est un très beau récit, porté par une poésie touchante.

    Un genre que je ne connais pas beaucoup, mais que j'apprécie.

    Ce roman a obtenu le Prix Goncourt des lycéens en 2010. Et bon, je ne suis pas le bon public, sans doute, mais ce roman, malgré toute sa beauté, me conforte dans l'idée que je me fais de la littérature française : c'est beau, mais c'est vide. J'ai tellement l'habitude de lire des romans efficaces, qui écrivent simplement mais dont les lignes regorgent d'aventures, que lire de très belles phrases sans qu'il n'y ait réellement de fond me gêne.

    Parce que oui, ce roman est beau. Oui, les métaphores, les passages avec l'ombre sont magnifiques. Mais si je devais résumer l'histoire en plus de cinq phrases, je crois que je resterais muette.

     

    Ce roman fut un agréable moment et je pourrais au moins dire que j'ai lu un Prix Goncourt dans ma vie. Il ne reste plus qu'à espérer que je n'ai pas à raconter l'histoire !


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  • 943hn8e1

     

    - Tu devrais aller te reposer, Pèire.
    - Je ne peux pas, pas tant que Ménandre est entre les mains de ces hommes.
    - Il a besoin que tu sois efficace dans tes recherches. Et être reposé te rendra efficace. Et maintenant, il y a Jehanne ici. Si elle se réveille et erre dans la taverne, ça pourrait poser problème.

    L'argument fait mouche et le tavernier baisse la tête. Posant une main sur l'épaule de Pèire, Elland le remercie pour ses explications et lui souhaite bien du courage. Puis, grimpant les escaliers, il se rend dans son antre. Il n'y reste que le temps de faire un brin de toilette et de se changer, puis se faufile à travers la lucarne pour rejoindre Echidna. Ils survolent un moment la ville, sans rien apercevoir d'étrange. En fait, seul compte le plaisir qu'ils éprouvent, tous les deux, à voler en parfaite symbiose, unis par la pensée. L'image du lieu de l'attaque s'impose dans son esprit. Presque aussitôt, Echidna met le cap vers cette ruelle. Du regard, ils cherchent tous les deux l'immeuble qui pourrait servir de repaire à leurs ennemis. C'est la présence d'un homme, allongé sur le toit le plus haut du quartier, qui les aide. La gargouille vient se poser non loin de lui, le faisant sursauter. Il se recule vivement en découvrant ce monstre de chair. Elland chuchote aussi :

    - Pas de panique, elle ne mord pas.

    Dans un coin de son esprit, il peut entendre le reniflement méprisant d'Echidna. Fichue susceptibilité. Mais ça fonctionne et l'homme se calme.

    - On m'avait dit que les gargouilles patrouillaient aussi. Mais je n'en avais jamais vu d'aussi près.
    - Elles sont impressionnantes, oui. La surveillance donne quoi ?
    - Rien. Rien du tout.
    - C'est où ?
    - Le second immeuble sur notre droite. Celui à trois étages.

    Elland, suivant les instructions de l'homme de Thémus, braque son regard sur l'immeuble en question. Parfaitement anodin, rien ne laisse à penser qu'il pourrait abriter d'aussi sombres activités. Se sermonnant, Elland réalise que non, ces hommes si prudents ne mettraient pas un panneau sur la façade annonçant leurs occupations. Le voleur s'installe à côté de l'homme de Thémus, Cilas apprend-il, et ils discutent un moment, de cette traque, de leurs rôles. Ils échangent des théories, assez farfelues. Rien de bien intéressant, en somme, si ce n'est qu'ils font passer le temps et luttent contre le sommeil. Jusqu'à ce que, soudain, deux hommes se faufilent hors de l'immeuble. L'aube est encore loin et la ville est endormie. Seuls les boulangers sont au travail à cette heure, mais Elland est convaincu que les deux énergumènes qui avancent discrètement ne sont pas des boulangers. Echidna s'envole aussitôt, promettant à Elland qu'elle le tiendra au courant de ses découvertes. Le voleur, lui, se tourne vers Cilas et lui demande :

    - Ça fait combien de temps qu'ils sont là.
    - Euh... ben... je dirais avant minuit. J'ai pris ma relève à cette heure.
    - Et l'homme que tu as relevé ne t'a pas dit qu'il les avait vu rentrer ?
    - Euh....

    L'homme hésite visiblement. Elland assiste, silencieux, à son débat intérieur : doit-il prétendre que c'est son complice qui a manqué d'attention ou doit-il reconnaître que c'est lui qui a failli à sa tâche ? Le voleur peut comprendre qu'à rester allongé sur le toit, une partie de la nuit, à surveiller le calme peut endormir. Mais la réussite de leur enquête dépend d'eux.

    - Parle !
    - Je ne les ai pas vu rentrer. Et mon collègue non plus.
    - Ça veut dire qu'ils sont là depuis ce matin ?

    L'homme ne répond pas. Son visage s'est fermé et montre une certaine résignation. Mais Elland n'apprécie pas du tout ce comportement : quand on fait une erreur, on l'assume. Alors, impitoyable, il insiste :

    - Réponds-moi !
    - Ecoute, Elland, j'ai une femme et des gosses. Je ne veux pas qu'il leur arrive quelque chose. Et si Thémus me renvoie, je ne pourrais plus les nourrir.
    - Thémus avisera. Dis-moi la vérité.
    - Personne ne les a vu rentrer.

    Pris d'un terrible pressentiment, Elland s'agite sur les tuiles d'ardoise. Puis d'une voix un peu trop aïgue, il demande :

    - C'est la première fois ?
    - Comment ça ?
    - C'est la première fois que vous ne les voyez que sortir ?
    - Non. Ça arrive aussi qu'on les voit rentrer mais pas ressortir.
    - Thémus est au courant ?
    - Non. Il nous lyncherait s'il savait que la surveillance n'est pas si parfaite qu'il le souhaite.


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  • Belle.jpg

     

     

    Résumé :

     

    Belle était loin d'être aussi jolie que ses soeurs.
    À quoi bon ? Aux soirées mondaines, aux robes somptueuses, elle préférait les chevaux et les auteurs anciens. Quand son père se trouva ruiné, elle en fut réduite à aller avec sa famille habiter une pauvre maison, dans un village au fond des bois. Tous auraient pu vivre ainsi, heureux d'une existence loin du luxe et des lumières de la ville, mais le destin s'acharna une fois encore sur eux. Quand son père revint au foyer avec l'histoire d'un château magique et de la terrible promesse qu'il avait dû faire à la Bête qui y vivait, Belle partit de son plein gré affronter le monstre et sa question sans cesse répétée : " Belle, voulez-vous...? ".

     

    Sympa!

     

    Mon avis :

     

    L'incomparable pouvoir des couvertures... Ce roman me faisait de l’œil depuis un moment déjà. L'histoire me plaisait. Du moins, l'idée de relire ce conte que je connaissais me plaisait. Et je ne suis pas déçue.

     

    Alors certes, autant le dire tout de suite, il ne faut pas s'attendre à beaucoup de suspens. On connait globalement l'histoire, et la fin. Oui mais...

     

    Les contes restent des histoires qu'on connait tous, plus ou moins. Mais dont on oublie les détails. Dans ce roman, l'auteur, avec son écriture fluide et très plaisante, nous entraîne dans cet univers à la fois connu et inconnu. L'histoire est étoffée, on s'attache aux personnages (et pas uniquement à Belle). Pas de surprises, donc, mais une très belle histoire. Et même si j'aurais aimé en lire encore plus sur la Bête, je suis satisfaite de ce que j'ai lu.

     

    Ce n'est pas un roman transcendant. Pas de ceux qu'on garde à jamais dans un coin de sa tête. Mais c'est une lecture agréable et plaisante.


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