• Rivemorte, Chap.26

    Enfer.jpg

     

     

    Alors seulement, il lâche la corde. Elland aspire une grande goulée d'air, qui embrase sa gorge meurtrie et met le feu à ses poumons. La séance est terminée pour aujourd'hui.
    Les deux geôliers sont de retour. Ils le relèvent, l'entravent à nouveau, le ramènent à sa cellule. Épuisé tant moralement que physiquement, le voleur n'essaie même plus de s'échapper. Nouveau jeu de chaînes, pour le contraindre dans sa petite cellule. Et ils le laissent seul.
    Recroquevillé sur lui-même dans la paille putride, il sanglote, harcelé par la douleur, oppressé par la panique.

    Un objet dur, tombant sur son visage, le réveille en sursaut. Les cerbères sont revenus. C'est une miche de pain qui lui ont envoyé à la figure, et non loin, ils ont déposé un pichet d'eau. Le voleur se ramasse un peu plus sur lui-même, craintif. Mais ils ne l'emmènent nulle part. Le plus âgé se contente de lui annoncer que le Comain Ormetus l'interrogera plus tard, et ils s'en vont. Le Comain... l'un des nombreux bourreaux officiel.
    Resté seul, Elland se précipite sur le pichet, en prend une longue gorgée. Sa gorge est encore douloureuse, mais l'eau apaise la sécheresse qui sévit dans sa bouche.

    Dans un état second, adossé au mur, il suit la course du soleil, obnubilé par la promesse de l'interrogatoire à venir. Interrogatoire... torture, plutôt. Les rumeurs qui courent dans les rues sont fondées : il leur faut un coupable, et ils sont prêts à toutes les bassesses pour obtenir des aveux. Mais il est innocent. S'il avait été arrêté pour vol, il aurait peut-être accepté plus aisément son châtiment. Après tout, il a toujours été conscient des risques qu'il prenait. Mais il n'avouera pas un crime qu'il n'a pas commis.

    Le soleil a disparu derrière les bâtiments lorsque la porte, silencieuse comme la mort, laisse entrer ses geôliers. Ils ne lui laissent aucune marge de manœuvre et l'entraînent jusqu'à la salle d'interrogatoire, où le Comain Ormetus les attend. C'est le petit homme sévère de la veille, qui a ôté le drap noir de la table, et qui caresse amoureusement les instruments posés dessus. Ils immobilisent Elland contre un mur, minutieusement enchaîné.
    Sans cacher le plaisir qu'il y prend, Ormetus use de nombreux instruments sur son prisonnier, le poussant sans répit à confesser ses crimes, se délectant de ses cris de douleur.
    Au petit matin, c'est un corps inconscient que les cerbères ramènent au cachot. Mais Elland n'a rien avoué.

    Lorsqu'il revient à lui, le lendemain, son corps n'est plus que douleur. Dans un coin de la cellule, sa ration quotidienne de pain et d'eau. Sa gorge le fait souffrir, tant il a hurlé sa douleur la veille, aussi se contente-t-il d'un peu d'eau. De toutes façons, il n'a pas vraiment faim. Il a juste mal.
    Les minutes s'égrainent lentement, rythmées par sa respiration sifflante et la douleur lancinante. Dans son esprit, une seule obsession tourne en boucle : ils vont le ramener auprès du Comain. Les mêmes questions seront encore posées, les mêmes menaces proférées, les mêmes injonctions martelées. Et de fait, il n'y coupe pas. Peu après la tombée de la nuit, la porte s'ouvre. Et il a beau les supplier, leur promettre monts et merveilles, ils ne cèdent pas.

    Durant ses longues heures d'attente, il rejette, les uns après les autres, tous ses projets d'évasion et tous ses plans pour se tirer de ce mauvais pas. Il est enchaîné même dans sa cellule, et les gardes ne lui laissent jamais la moindre opportunité.
    Il pourrait envoyer un appel au secours.... mais comment ? Et à qui ? Echidna ne pourrait rien faire. Thémus... ce serait trop dangereux d'impliquer Thémus dans cette affaire, sans compter qu'il serait impuissant : seul quelqu'un de très haut placé peut influencer un Comain. Certes, des personnes haut placées, il en connait beaucoup. Il connaît parfaitement la ronde de leurs gardes privées, l'emplacement de leur coffre fort, et il a même quelque unes de leur babioles dans sa réserve secrète. Mais ce n'est pas vraiment connaître dans le sens où il en a besoin.
    Il n'a pas de groupe d'amis, qui seraient prêts à tout faire pour le sortir de là. A vrai dire, il n'est même pas sûr que quiconque remarque sa disparition...

    Les jours s'écoulent dans un brouillard vaporeux. Elland en a perdu le compte. Le rituel est immuable : ses geôliers apportent la nourriture quand il est encore inconscient. Puis l'attente infernale, supplice raffiné qui menace de faire sombrer son esprit dans le chaos. Au crépuscule, ils l'emmènent dans cette salle qu'il exècre, auprès de cet homme qu'il abhorre. La nuit est un enchaînement de tortures insoutenables, soigneusement dosées pour qu'il les subisse jusqu'à ce que son bourreau se lasse. Mais il n'avoue pas.

    Le Comain s'impatiente, trépigne de rage. Intensifie et diversifie les douleurs pour le faire craquer. Pour qu'enfin, l'esprit de son prisonnier bascule. Et à mesure que passent les jours, dans l'esprit d'Elland, se forge une idée : il devrait confesser ces crimes qu'il n'a pas commis. Car même s'il doit mourir pendu et déshonoré, l'enfer cesserait.

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  • Commentaires

    2
    Mercredi 19 Janvier 2011 à 10:07
    Blanche

    La suite est écrite. Et je la posterais demain :P

    1
    Mercredi 19 Janvier 2011 à 02:52
    Anémone

    Oh là, là! C.'est tellement cruel de laisser ça comme ça, sans suite à lire...

    Elle est prévue pour bientôt? J'avoues que cette histoire a été un peu longue a démarrer, mais là, je suis vraiment accrochée dessus!

    J'espère que je pourrai lire chapitre 27 bientôt! (Dsl, je mets la pression T.T')

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