• Rivemorte, Chap.38

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    Sur le seuil de la petite boutique aux fragrances de cuir, il dissimule la lourde bourse sous sa chemise et fait en sorte qu'une main baladeuse ne puisse pas s'emparer, par mégarde, de ses biens. Il passe le reste de la journée à déambuler en ville, pris par un tourbillon de pensées. Et lorsque le soleil disparaît à l'horizon, il se décide finalement à pousser la porte de l'Hermine Affamée.

    La jolie serveuse est toujours là, vêtue d'une robe bleu nuit qui met parfaitement en valeur ses formes, mais elle l'évite habilement. Il hausse les épaules, de toutes façons il a bien plus important à penser en ce moment que courir les jupons. D'un pas décidé, il se dirige vers la cuisine, espérant croiser Pèire, mais il se fait purement et simplement jeter dehors par une cuisinière passablement énervée. Dépité, il se réfugie dans la ruelle derrière la taverne, et se laisse lourdement tomber sur le petit banc. Il est épuisé, tant physiquement que moralement.
    Le haut du crâne posé contre le mur encore tiédi par le soleil estival, les yeux fermés, il tente de se décider. Il veut reprendre sa vie d'avant. Voler, s'amuser, traîner dans les tavernes et charmer les jolies filles. Il veut être à nouveau complice avec Echidna, la voir le matin quand il va se coucher, attendre son réveil au crépuscule. Peut-il seulement espérer retrouver un logement aussi pratique que l'ancien ? Peut-il seulement espérer continuer à voler ? Est-ce compatible avec une vie à auberge ?


    - Tu comptes dormir là ?

    Elland se redresse en sursaut, surpris. Pèire le dévisage, un léger sourire aux lèvres, et s'installe à côté du voleur. Il poursuit, comme si de rien n'était :

    - Remarque, tu n'es pas si mal ici...
    - Possible. Mais ça ferait mauvais genre pour l'Hermine Affamée.
    - Ah ça, oui. On dirait que je laisse un ami dormir dehors. Que je ne lui tends pas la main quand il en a besoin.
    - Alors, c'est pour ça que tu le fais ? Pour soigner ton image ?

    Éclatant de rire, Pèire lui donne une claque amicale, qui manque de lui déboîter l'épaule. Grimaçant, Elland tente de sourire à son tour. Avant qu'il n'ait pu ajouter qu'il plaisantait, Pèire lui répond d'une voix douce :

    - J'espère que tu sais bien que ce n'est pas genre.
    - Oui, je le sais. Mais j'ignore comment te remercier pour tout ce que tu fais...
    - Arrête avec ça, veux-tu ? Tu as réfléchi à ma proposition ?
    - Un peu, oui. Mais je pose mes conditions : je veux payer un loyer. Je voudrais, si tu as, un endroit un peu à l'écart avec, si possible, un accès sur le toit. Personne ne vient nettoyer ma chambre. Et je paie aussi mes repas. Et si il m'arrive quoique ce soit, je ne veux pas que tu sois impliqué.
    - Hé ben ! Dire que je te pensais plus …

    Pèire s'est fait songeur, et paraît chercher ses mots. Impatient, Elland le presse :

    - Plus quoi ?
    - Plus … naïf, en fait.
    - Naïf ? Moi ? Mais pas du tout ! Alors là, absolument pas !
    - Si tu le dis...

    Elland esquive habilement la claque amicale qui allait s'abattre une nouvelle fois sur son épaule. Le temps d'un battement de cils, Pèire redevient sérieux et poursuit :

    - D'accord pour le loyer. Le même que tu payais dans ton ancien logement, si tu veux.
    - Deux pièces d'argent par mois.
    - Tant que ça ? D'accord ! Ça me convient parfaitement. Pour l'emplacement, j'ai ma petite idée, je te montrerai tout à l'heure. Et pour le ménage …
    - Je m'en occuperai tout seul. J'ai l'habitude.
    - Ménandre et moi aurons quand même le droit de te rendre visite ?
    - Bien sûr. Mais uniquement des personnes de confiance.
    - Très bien. Tu as d'autres exigences ?
    - Oui. Je voudrais que tu m'expliques pourquoi tu avais l'air si mal à l'aise quand vous m'avez soigné.

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