• Rivemorte, Chap.29

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    Resté seul, Elland essaie de faire le point sur la situation, tout en savourant l'excellent remède pour la gorge. Mais la douleur l'empêche de réfléchir, d'autant plus qu'il lui manque un grand nombre d'éléments pour reconstituer les faits depuis son arrestation.

    La porte qui tourne sur ses gonds le tire de ses réflexions et laisse entrer Pèire, étrangement maladroit avec son large plateau entre les mains. Sous le regard perçant d'Elland, il le dépose sur la petite table, fait tinter la vaisselle et les couverts. Il s'affaire un moment, donnant l'impression de brasser du vent.
    Le tavernier semble enfin se détendre un peu, passe sa grosse main dans ses cheveux hirsutes, et fait face à son malade. Il évite son regard, mais sourit légèrement.
    Malgré son état, le convalescent s'aperçoit de son malaise. Pourtant, il ne se l'explique pas. Pèire vient s'asseoir sur le tabouret, et l'observe, soucieux. Lorsqu'Elland fini par remuer, gêné par l'examen, il hoche doucement la tête, en guise de salut.

    - Bon retour parmi nous, Elland.

    Elland marmonne un vague remerciement, mais sans conviction. Ses yeux interrogateurs ne quittent pas le visage du tavernier : il veut savoir ce qui le met si mal à l'aise. Mais le géant se contente de s'agiter sur son siège et Elland devine qu'il n'en saura pas plus. Alors d'une voix plus assurée, il reprend :

    - Merci... merci pour tout ce que tu as fait pour moi.
    - C'était normal de le faire.
    - Comment tu as su ?
    - Echidna. Je ne comprends pas comment elle a pu ressentir ta détresse, mais elle m'a aussitôt contacté. Nous étions sur le point de quitter les grottes, alors nous nous sommes dépêchés.

    Un peu bêtement, Elland regarde autour de lui, à la recherche de sa gargouille. Comme si elle pouvait se cacher dans le dos de Pèire ! Mais ce dernier a surpris son coup d'œil, et le rassure d'une voix douce :

    - Elle n'attend que ça, de te revoir. Mais elle ne peut pas venir ici. Dès que tu iras mieux, Ménandre te conduira à elle, promis.

    La gorge nouée par l'émotion à l'idée de revoir sa chère gargouille, le voleur est parfaitement incapable de répondre. Tous ces gens, qu'il connaît à peine et qui prennent des risques insensés pour le sauver... Y a-t-il seulement un moyen de les remercier à la hauteur de leurs actes ?

    - Je n'ai pas fait grand-chose, Elland. Echidna et moi nous ne pouvions pas t'aider. Quand tu es pris dans leur engrenage infernal, il n'y a pas beaucoup de solutions. En réalité, c'est Thémus qui a trouvé le moyen de te tirer de là. Moi, j'ai juste indiqué à Echidna à quel moment tu sortais, pour qu'elle t'attende et te ramène auprès de moi.
    - Et tu m'as accueilli ici pour me faire soigner...
    - Tu en avais besoin. Tu étais ...

    Il s'interrompt, voulant éviter de trop insister sur l'état de santé inquiétant de son ami, mais la fin de sa phrase flotte dans l'air, quasiment audible. Un peu gêné, il reprend rapidement :

    - Enfin, tu es sauf maintenant !
    - Je ne sais pas comment te remercier...

    Le colosse hausse ses épaules massives, il n'attendait rien en retour. Mais Elland, qui a toujours été seul et indépendant, conçoit mal qu'une personne puisse se montrer totalement désintéressée. D'un geste maladroit, Pèire lui ébouriffe les cheveux et s'exclame joyeusement :

    - Remets-toi sur pied, c'est tout ce que je demande !
    - Au fait ! Merci pour Ménandre. Il a l'air vraiment heureux ici.

    Un nouveau haussement d'épaule bourru lui répond. Sous ses airs d'ogre se cache un cœur d'or et la générosité lui semble naturelle. Il se lève et lui apporte le plateau : un velouté, d'une jolie couleur verte, dont le fumet fait saliver le blessé. Une épaisse tranche de pain, qu'il devine à la fois tendre et croustillante. Un morceau de fromage au parfum alléchant. Et un grand pichet de vin coupé à l'eau.

    - Mange mon grand, reprend des forces.

    Il se tord les doigts, nerveux, avant de faire volte-face et de se précipiter hors de la chambre. La cuillère à mi-chemin de sa bouche, le voleur en reste pantois. Puis son estomac le rappelle rapidement à l'ordre et il chasse son trouble pour faire honneur au repas.
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