• Un texte triste

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    Thème
    Tout ce qui est triste, ce pourrait aller d'une histoire d'enfant avec un jouet cassé, un suicide, etc. Bref faut que l'ambiance général soit triste

    Restrictions
    - Le personnage principal de l'histoire devra être un animal.
    - Nous devrons utiliser les mots "aluminium", "café" et "fil".

     

     

    Du bout du museau, il pousse la patte inerte de sa mère. Comme elle ne réagit pas, il insiste, pousse un peu plus fort. Pensant qu'elle souhaite jouer, il lui saute allégrement sur le dos. Dans ce genre de cas, elle se relève vivement en grognant, et lui n'a plus qu'à vite courir se cacher. Enfin, d'habitude. Mais cette fois, elle ne réagit pas. Poussant de légers gémissements, il vient se frotter contre son museau. Son museau froid, d'où aucun souffle ne s'échappe. Il se fige, donne un coup de langue, comme pour apporter à nouveau chaleur et humidité sur la truffe glacée. Voyant qu'il n'y a plus rien à faire, il s'assied et pousse un hurlement.

    Un soudain craquement de branches le fait brusquement tourner la tête. Sans grâce ni discrétion, l'homme s'approche de lui. Mettant à profit les recommandations de sa mère, le louveteau détale et se faufile entre les arbres. Son cœur bat fort entre les côtes. Sa nature même se révolte à l'idée d'être une proie. Mais face à l'homme, il n'a aucune chance. Presque instinctivement, il sait que la présence de l'humain est responsable de la mort de sa mère, même s'il n'en connait pas la cause précise. S'il est le seul de la portée à avoir survécu, ce qui prouve sa force, il sait qu'il ne fera pas le poids face à un tel ennemi. Alors il court, de toutes ses forces, aussi vite que ses petites pattes lui permettent.

    C'est facile de suivre la progression de l'homme à l'ouïe. Ses pas sont lourds, son souffle bruyant. Avec habilité, le louveteau saute par dessus les racines saillantes des arbres, se faufile sous les arbres morts, se glisse entre les buissons. C'est comme un jeu de course qu'il faisait, avec sa mère. Presque. Mais alors que le bruit de l'homme s'éloigne, il freine des quatre fers. Le vent apporte l'odeur d'un autre humain, juste en face de lui. Ils ne prennent aucune précaution, savourent leur toute-puissance.

    Faisant jouer ses jeunes muscles déjà puissants, il pivote sur la droite et s'élance. La panique commence à le gagner. Combien sont-ils ? Il n'a pas le temps de s'épuiser dans cette course-poursuite. Sous ses coussinets, le sol s'est ouvert, et il plonge dans les entrailles de la terre.

    Il est dans un trou, profond et étroit. Il lui suffit de quelques mouvements pour comprendre qu'il ne pourra pas s'échapper de là. Il tourne en rond, paniqué. Pousse un hurlement pour appeler à l'aide. Mais sa mère ne viendra pas, et il le réalise rapidement. Gémissant, il comprend qu'il ne peut compter que sur lui pour se sortir de là. Il commence à creuser, avant de s'arrêter. Ce n'est pas comme ça qu'il va pouvoir s'échapper.

    Son instinct le pousse à lever le museau vers le ciel. Au bord du trou, deux silhouettes le regardent avec un sourire satisfait. Retroussant les babines, il grogne. Cette fois, ce sont des rires qu'il entend. Puis ils disparaissent, le laissant là, seul au fond du trou.
    Le soleil s'enfuit, la lune arrive. Puis la lune a son tour disparaît. Il a essayé de dormir, en vain. La faim le taraude. La peur aussi. Ils ne sont pas revenus.

    Il perd le fil du temps qui passe, inexorablement. Il mâchouille un bout de racine pour apaiser les crampes d'estomac. Soudain, c'est un morceau de viande qui descend lentement vers lui. En haut, une silhouette le domine de toute sa taille. La viande pue l'humain, pourtant, il tourne autour, la renifle, résiste à la tentation. Mais il ne veut pas mourir de faim. Et ses pattes, si faibles, lui prouvent qu'il n'en est plus bien loin. Alors il s'empare de la nourriture et la dévore. Quelques minutes plus tard, il s'écroule dans la terre meuble.

    Il se réveille dans une cage aux épais barreaux. Autour de lui, une cage encore plus grande semble en mouvement. Une odeur de café plane, une odeur qu'il ne connait pas et qu'il n'aime pas. Les deux hommes font du bruit, communiquent. Il gratte le sol étrange de sa cage, essaie de s'enfuir. Mais il ne fait que se blesser les pattes.
    Brusquement, le mouvement cesse, et il retombe sur son derrière, surpris. Le jour se fait, alors qu'une partie de la grande cage s'ouvre. Les deux hommes lui font face. Ils soulèvent la cage, la portent à l'air libre. Dans un réflexe de défense, il grogne, attisant leurs rires.

    Puis un petit homme s'approche dans un bruissement d'aluminium. Engouffrant une généreuse portion de chocolat, il postillonne :

    - C'est ça que je veux !

    « Oscar Wilde et le meurtre aux chandelles, Gyles BrandrethLe parchemin disparu de Maitre Richard, Laetitia Bourgeois »

  • Commentaires

    2
    Gunenièvre
    Mercredi 3 Juillet 2013 à 14:53
    Gunenièvre

    Ouha!

    Tu as une plume géniale, j'aime beaucoup ce récit: tu as réussi à créer du suspens en 20 lignes... Je suis admirative.

    La trame me fait un peu penser à L'appel de la forêt de Jack London. Un quelconque rapport?  

    1
    Samedi 10 Décembre 2011 à 21:25
    Blanche

    Merci beaucoup !

    Je n'ai jamais lu l'Appel de la forêt donc je ne pense pas qu'il y ait de rapport :P

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