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    Résumé :

     

    1123 après le pacte…
    Les druides règnent en maîtres sur la Forêt, un royaume millénaire.
    Ils conseillent les hommes, du plus humble au plus puissant, grâce à leur sagesse ancestrale.
    Lorsqu’un mal ancien refait surface, un druide va tenter d’empêcher une guerre fratricide d’éclater. Pour cela, il devra percer des mystères liés aux plus noirs secrets de la Forêt.

     

    Sympa!

     

    Mon avis :

     

    Après avoir lu des dizaines de critiques particulièrement enthousiastes à son sujet, je ne pouvais pas passer à côté de ce bouquin. Mais autant le dire tout de suite, je suis un peu déçue.

     

    Les personnages sont sympathiques, sans être non plus totalement attachants à mon goût. L'auteur a su éviter l'écueil des clichés trop manichéens, et il s'avère que les méchants ne sont pas totalement méchants, et les gentils, pas totalement gentils. Le héros du roman, bien qu'on le suive avec plaisir, ne m'a pas spécialement touché, même si je comprends parfaitement ses motivations. Il manque un petit quelque chose qui le rendrait vraiment attachant.

     

    L'intrigue est bien menée, là dessus, rien à dire. On découvre le monde, notre curiosité est titillée puis effrayée. Et le roman va crescendo jusqu'au dénouement. J'ai aimé la manière dont on découvre, en même temps que le druide, les mystères de la forêt. Même si certaines choses sont prévisibles, on reste tout de même surpris.

     

    Alors qu'est-ce qui ne m'a pas plu ? L'impression de ''trop''.

     

    J'ai trouvé certains dialogues trop étudiés, ils manquent de naturel et laissent clairement percevoir que c'est l'auteur qui explique quelque chose au lecteur et non pas deux personnages qui discutent.

     

    J'ai trouvé que certaines descriptions, certains passages sont trop détaillés : l'auteur va mettre un paragraphe à nous expliquer des notions qu'on a compris en deux lignes, notamment en ce qui concerne les sentiments du druide. 

     

    Il y a trop de paragraphes également : le récit est aéré, certes, mais certaines dernières phrases de paragraphe manquent de force, ne percutent pas vraiment. Du coup, on a l'impression que le découpage a été fait un peu maladroitement et que les "chutes" tombent à plat.

     

    Et enfin, j'ai trouvé que l'auteur en faisait trop en ce qui concerne l'histoire en elle-même : certaines batailles sont trop détaillées, trop sanglantes (Savoir qu'un druide, lors d'un combat, se fait arracher la moitié du visage, et connaître les détails, c'est trop à mon avis). Certains mots de vocabulaire sont trop forts, également : lors d'une bataille, un personnage se fait ''labourer'' le torse, mais ça ne le perturbe pas pour continuer le combat.

    Vers la fin, la situation semble trop désespérée à mon avis. Ou du moins, l'auteur insiste un peu trop là-dessus à mon goût.

     

    L'aspect de la forêt et des druides, thème central, est bien expliqué, mais je n'ai pas ressenti cette communion entre les deux. La plume de l'auteur est parfois très évocatrice, notamment lors des combats, mais moins lorsqu'il s'agit de notions moins sensibles et je trouve ça dommage.

    Peut-être que je n'ai pas lu ce roman au bon moment, peut-être que si je le relis dans quelques mois, j'aurais un vrai coup de cœur. Peut-être.

     

    Le récit n'en reste pas moins plaisant à lire : on veut savoir comment tout ça va se terminer. Mais voilà, si je dois en parler autour de moi, je ne serais pas autant enthousiaste.


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    Resté seul, Elland essaie de faire le point sur la situation, tout en savourant l'excellent remède pour la gorge. Mais la douleur l'empêche de réfléchir, d'autant plus qu'il lui manque un grand nombre d'éléments pour reconstituer les faits depuis son arrestation.

    La porte qui tourne sur ses gonds le tire de ses réflexions et laisse entrer Pèire, étrangement maladroit avec son large plateau entre les mains. Sous le regard perçant d'Elland, il le dépose sur la petite table, fait tinter la vaisselle et les couverts. Il s'affaire un moment, donnant l'impression de brasser du vent.
    Le tavernier semble enfin se détendre un peu, passe sa grosse main dans ses cheveux hirsutes, et fait face à son malade. Il évite son regard, mais sourit légèrement.
    Malgré son état, le convalescent s'aperçoit de son malaise. Pourtant, il ne se l'explique pas. Pèire vient s'asseoir sur le tabouret, et l'observe, soucieux. Lorsqu'Elland fini par remuer, gêné par l'examen, il hoche doucement la tête, en guise de salut.

    - Bon retour parmi nous, Elland.

    Elland marmonne un vague remerciement, mais sans conviction. Ses yeux interrogateurs ne quittent pas le visage du tavernier : il veut savoir ce qui le met si mal à l'aise. Mais le géant se contente de s'agiter sur son siège et Elland devine qu'il n'en saura pas plus. Alors d'une voix plus assurée, il reprend :

    - Merci... merci pour tout ce que tu as fait pour moi.
    - C'était normal de le faire.
    - Comment tu as su ?
    - Echidna. Je ne comprends pas comment elle a pu ressentir ta détresse, mais elle m'a aussitôt contacté. Nous étions sur le point de quitter les grottes, alors nous nous sommes dépêchés.

    Un peu bêtement, Elland regarde autour de lui, à la recherche de sa gargouille. Comme si elle pouvait se cacher dans le dos de Pèire ! Mais ce dernier a surpris son coup d'œil, et le rassure d'une voix douce :

    - Elle n'attend que ça, de te revoir. Mais elle ne peut pas venir ici. Dès que tu iras mieux, Ménandre te conduira à elle, promis.

    La gorge nouée par l'émotion à l'idée de revoir sa chère gargouille, le voleur est parfaitement incapable de répondre. Tous ces gens, qu'il connaît à peine et qui prennent des risques insensés pour le sauver... Y a-t-il seulement un moyen de les remercier à la hauteur de leurs actes ?

    - Je n'ai pas fait grand-chose, Elland. Echidna et moi nous ne pouvions pas t'aider. Quand tu es pris dans leur engrenage infernal, il n'y a pas beaucoup de solutions. En réalité, c'est Thémus qui a trouvé le moyen de te tirer de là. Moi, j'ai juste indiqué à Echidna à quel moment tu sortais, pour qu'elle t'attende et te ramène auprès de moi.
    - Et tu m'as accueilli ici pour me faire soigner...
    - Tu en avais besoin. Tu étais ...

    Il s'interrompt, voulant éviter de trop insister sur l'état de santé inquiétant de son ami, mais la fin de sa phrase flotte dans l'air, quasiment audible. Un peu gêné, il reprend rapidement :

    - Enfin, tu es sauf maintenant !
    - Je ne sais pas comment te remercier...

    Le colosse hausse ses épaules massives, il n'attendait rien en retour. Mais Elland, qui a toujours été seul et indépendant, conçoit mal qu'une personne puisse se montrer totalement désintéressée. D'un geste maladroit, Pèire lui ébouriffe les cheveux et s'exclame joyeusement :

    - Remets-toi sur pied, c'est tout ce que je demande !
    - Au fait ! Merci pour Ménandre. Il a l'air vraiment heureux ici.

    Un nouveau haussement d'épaule bourru lui répond. Sous ses airs d'ogre se cache un cœur d'or et la générosité lui semble naturelle. Il se lève et lui apporte le plateau : un velouté, d'une jolie couleur verte, dont le fumet fait saliver le blessé. Une épaisse tranche de pain, qu'il devine à la fois tendre et croustillante. Un morceau de fromage au parfum alléchant. Et un grand pichet de vin coupé à l'eau.

    - Mange mon grand, reprend des forces.

    Il se tord les doigts, nerveux, avant de faire volte-face et de se précipiter hors de la chambre. La cuillère à mi-chemin de sa bouche, le voleur en reste pantois. Puis son estomac le rappelle rapidement à l'ordre et il chasse son trouble pour faire honneur au repas.

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    Résumé :

     

    1489.
    Une vague de crimes ensanglante le Japon, fauchant un à un les samouraïs errants qui s'aventurent sur les routes du pays. L'enquêteur Ryôsaku, secondé dans sa tâche par trois jeunes trublions plus motivés par les plaisirs de Kyôtô que par l'initiation aux mystères de l'investigation, est missionné par ses supérieurs pour traquer et démasquer le tueur. Les indices trouvés sur les lieux des combats ont cependant de quoi dérouter même le plus brillant des agents du shôgun : l'auteur des massacres est-il seulement humain ?

     

    Coup de coeur

     

    Mon avis :

     

    Autant l'avouer tout de suite : je suis totalement inculte dans tout ce qui touche le Japon. Mais bon, il suffit de me parler de samouraïs errants et de meurtrier à peine humain pour titiller ma curiosité et enflammer mon imaginaire donc je me suis lancée.

    Et c'est un vrai coup de cœur.

     

    Ce qui m'a plu, tout d'abord, c'est la plume de l'auteur. Au risque de faire un parallèle un peu hasardeux, disons qu'elle ressemble à l'idée de ce que je me fais de l'art japaonais : simple et beau à la fois. Il trouve les mots juste pour rendre un personnage attachant, un paysage envoûtant, un sentiment imparable. J'aime la simplicité avec laquelle il utilise le mot juste, qui touche le lecteur, sans faire quinze phrases pour arriver à son but. Un exemple :

     

    «  Sôzô reconnaît les mots que lui assénait son propre père, les mêmes certitudes du guerrier possédant un sable à la place du cœur, méprisant la douceur et la compassion, se gargarisant d'honneur et de courage alors qu'il ne connaît en vérité d'autre vertu que la brutalité. »

     

    Et l'auteur a su mettre en place toute une galerie de personnages tous plus attachants les uns que les autres. Les personnages principaux, d'abord, qu'il a su rendre à la fois drôles et touchants. Et même les personnages plus secondaires, comme les fillettes : elles semblent parfaitement réelles, spontanées, leurs péripéties sonnent juste. Il sait créer des occasions cocasses, certains personnages drôles, avec une sorte de running-gag. Et encore une fois, il sait s'arrêter quand ça devient un brin pesant.

     

    Et le fil principal, l'enquête. Là, j'avoue qu'il ne faut pas s'attendre à une enquête policière comme on en lit d'habitude. On ne découvre pas le coupable trois pages avant la fin. Mais l'intérêt n'est pas là. Au fil des rencontres, de nouvelles intrigues arrivent, s'entremêlent, pour se délier l'une après l'autre.

     

    C'est un vrai coup de cœur, donc, et je fouine à droite à gauche pour trouver d'autres romans de cet auteur. Déjà parce que le roman est trop court. Et puis, sa plume m'a convaincu, j'en veux plus !


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  • C'est un texte écrit dans le cadre d'un speed-writing : je donne un thème, et les joueurs ont une heure pour en faire un récit. Cette fois, le thème était un peu différent puisqu'il s'agissait d'une image. Le but n'est pas de décrire l'image, mais de créer un récit dans ce paysage. Restriction de temps plus longue, donc.


     

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    Ses pas sont lourds, sa démarche laborieuse. Il transpire abondamment sous le soleil implacable. Mais il trouve la force d'avancer en gardant les yeux rivés sur les deux pierres dressées en haut de la montagne. Des emplâtres de boue et de sang séchés, qui furent des bandages d'un blanc immaculé quelques jours auparavant, ornent ses deux bras. Son visage, sévère et dur, est lui aussi maculé. Sous le casque, ses yeux, pareils à des saphirs résignés, ne quittent pas les pierres.
    Chaque pas est alourdi par sa cotte de maille, son bouclier et son épée. Chaque pas qui le mène au sommet est un supplice, mais il s'est juré d'y arriver.

    Après ce qui lui semble être une éternité, les deux silhouettes majestueuses qui se dressaient à l'horizon lui font face. D'une main épuisée, il en caresse la surface rugueuse, et sur son visage s'étire un sourire de soulagement. Alors il se laisse tomber au sol et se débarrasse, non sans mal, de son arme, de son bouclier et de sa cotte de maille. Il s'allonge dans l'herbe, et ferme les yeux quelques instants. Juste quelques instants, histoire de savourer son ultime victoire.
    Lorsqu'il ouvre à nouveau les yeux, le soleil s'est dangereusement approché de l'horizon. Alors, machinalement, il déchire un morceau de la chemise, autrefois blanche, qu'il porte sous sa cotte de maille. Et avec des gestes dictés par l'habitude, il frotte les tâches qui souillent son arme et son bouclier, tandis que ses pensées s'égarent.

    La bataille a viré au massacre, comme ils s'y attendaient tous. Lorsque les deux nations les plus puissantes d'un continent se déclarent la guerre, animées par une haine viscérale centenaire, il ne peut en résulter que le chaos. Les deux armées, aux soldats innombrables, se sont retrouvées sur l'une des plus vastes plaines du continent. Et l'enfer s'est déchaîné.

    Les yeux fermés, les mains toujours affairées à restituer la splendeur de son équipement, il se souvient. Il se rappelle du chaos, de l'odeur du sang mêlé à la boue. Il entend à nouveau le cri de guerre de son peuple, les hurlements des blessés. Les gémissements, ensuite, quand la vie les quittait trop lentement. Il revoit les regards fiévreux, remplis de haine puis de terreur abjecte.
    Dans un état second, endoctriné par la haine des autres, il a tué, il a mutilé, il a souillé la terre du sang de ses semblables. Et quand il a repris ses esprits, la plaine n'était plus qu'un immense charnier. Oh, il restait bien des hommes debout, une poignée seulement, mais continuer aurait été absurde. Deux peuples ennemis. Deux peuples anéantis.
    Sans lâcher ses armes, il avait fait demi-tour, tourné le dos au massacre comme s'il pouvait, par ce seul geste, en effacer l'horreur et il avait quitté le champ de bataille. Plus tard, il avait soigné ses multiples blessures, mû par la seule volonté de vivre.

    L'épée brille comme au jour de sa fabrication. Le bouclier arbore fièrement les armoiries de ce peuple aujourd'hui à l'agonie. Il prend délicatement son casque, déformé par de nombreux coups qui lui ont sauvé la vie. Avec amour, il le polit, le rend étincelant, une toute dernière fois. Il a trop vécu la guerre. Il n'aspire plus qu'à la paix désormais. Comme la flèche plantée au pied de la pierre le symbolise, la folie des hommes s'arrête ici. De l'autre côté règne la paix.

    En hommage aux hommes tombés au combat, à cette nation qui l'a vu naître et qui l'a fait grandir, il dépose soigneusement ses armes désormais immaculées contre la pierre. Un regard en arrière lui permet d'apercevoir une infime partie de la plaine. Plus jamais ça.
    Alors d'un pas décidé, il franchit les monolithes, laissant derrière lui une vie de haine. Au cœur des montagnes, il demandera humblement l'asile au peuple pacifique.


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    Résumé : La pitié et la faiblesse n'ont pas leur place dans les steppes d'Asie centrale. Lorsque Yesugei, khan de la tribu des Loups, meurt sous les coups des Tatars, ses anciens compagnons en profitent pour prendre le pouvoir. À onze ans, Temüdjin est bien trop jeune pour s'opposer à ce coup de force. Impuissant, le second fils de Yesugei est abandonné avec sa famille à la merci des bêtes sauvages et du vent glacé, livré à une mort certaine. Mais c'est ainsi que se forgent les destins. Et celui de Temüdjin, hors du commun, est de devenir le plus grand conquérant mongol, le prodigieux Gengis Khan...

     

    J'ai aimé  

    Mon avis : Je ne connaissais pas beaucoup Gengis Khan, hormis de réputation bien sûr. Quand j'ai vu ce livre, je me suis laissée tenter en me disant que ça me ferait du bien de changer un peu de style de lecture. Et je ne le regrette pas du tout.

     

    J'ai trouvé les cent premières pages un peu longues, même si je comprends maintenant qu'elles n'étaient absolument pas superflues. Peut-être à cause du quatrième de couverture, qui en dit, encore une fois, un peu trop. Dommage.

    Quoiqu'il en soit, lorsque le père de Temüdjin meurt, le récit prend toute son ampleur, et il devient réellement difficile de refermer le livre. On veut connaître la suite, on veut savoir s'ils sont s'en sortir (même si on se doute de l'issue).

     

    L'auteur a su faire preuve d'une plume légère et fluide, qui, sans être simple, ne fait que mettre en valeur le récit. S'il n'hésite pas à s'attarder sur des passages parfois un peu crus, ce n'est jamais que pour mieux servir l'histoire. Car tous ces passages ont leur raison d'être, et expliquent comment un jeune garçon va devenir le célèbre Gengis Khan.

     

    J'ai beaucoup aimé la manière dont on suit les étapes de leurs vies : lorsqu'ils arrivent à créer leurs propres arcs, leurs propres flèches. C'est un enseignement précieux, bien au delà de l'histoire de Gengis Khan, qui nous fait nous rappeler que certains, aujourd'hui encore, n'ont pas le réflexe d'aller acheter ce qu'il leur manque.

    On s'attache aux personnages, on les suit avec appréhension, avec émotion.

    Ils n'ont pas une vie facile, loin de là, et la compassion, la faiblesse n'est qu'un danger pour eux. Le récit est dur, et pourtant largement teinté d'affection et d'amour. Temüdjin est un homme impitoyable, mais jamais cruel, avec un grand sens de l'honneur.

    J'ai également beaucoup aimé la rencontre avec ambassadeur Jin : cet homme, qui considère les tribus comme des moins que rien, suscite l'incompréhension. Il traverse la steppe en palanquin, porté par des serviteurs. Lorsque Temüdjin le voit, il se demande ce que contient cette grosse boîte. De même, les termes ''machine'' ou ''imprimé'' ne lui évoquent strictement rien. Lorsque l'ambassadeur lui montre un billet, il ignore ce que c'est, ce qui démontre bien le fossé qu'il existe entre les deux ''nations''.

    Pour conclure, je dirais que c'est un livre qui m'a beaucoup touché. J'en ai appris beaucoup sur cet homme, de manière parfaitement plaisante. C'est une lecture totalement dépaysante. Un vrai coup de cœur.

     

     

    Bon à savoir : Le second tome de cette saga paraitra début mars. Pour les plus impatients, il est déjà sorti en grand format.

     

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  • Il fait nuit lorsqu'il ouvre à nouveau les yeux. Seul un brasero posé sur la petite table dispense de la lumière dans la chambre. Ménandre est encore là, mais cette fois, il le regarde avec ses grands yeux trop graves pour son âge. Et c'est tout son visage qui s'illumine de joie lorsqu'il constate le réveil du voleur.
    Aussitôt, il se précipite et porte aux lèvres d'Elland un bol, rempli d'un liquide délicieux. Avec des geste habiles, il l'aide à boire doucement puis repose le récipient près du lit. Assis sur le rebord du matelas, la mine sérieuse, il lui demande :


    - Comment tu te sens ?
    - Viens là.

    D'un geste, Elland désigne le drap, et Ménandre s'allonge à ses côtés sans hésiter. La joue contre le crâne du gamin, Elland le serre contre lui et murmure « J'ai bien cru que je ne te ne reverrai jamais ». Ménandre reste silencieux, mais se rapproche un peu plus, tout en prenant garde à ses blessures. Après les souffrances passées, Elland savoure cette étreinte tendre et chaleureuse pendant de longues minutes avant de déclarer dans un chuchotement rauque :

    - C'est meoi qui devait t'aider... pas l'inverse.
    - Ben là, c'est toi qu'avait besoin. Et pis, j'ai pas fait grand chose.

    Les larmes remplissent soudain les yeux du voleur et courent le long de ses joues sans qu'il ne puisse rien y faire. Les mots lui manquent pour exprimer son soulagement, sa joie et sa reconnaissance. L'émotion forme une boule dans sa gorge, qui l'empêche de dire quoique ce soit. Si Ménandre remarque quelque chose, il ne fait aucune réflexion et lui laisse le temps de se reprendre avec un tact bienvenu. Lorsqu'Elland s'en estime capable, il demande, de sa voix éraillée :

    - Où sommes-nous ?
    - A l'Hermine Affamée.
    - Mais... elle est fermée.
    - Plus maintenant. Pèire l'a rachetée. Parce qu'un tavernier sans taverne, ça fait désordre, tu comprends ?
    - Pèire est ici alors ?
    - Oui. Et il m'a embauché !
    - Vraiment ? Tu fais quoi ?
    - Ben, il dit que je lui sers de petite main. Mais elles ne sont pas si petites que ça, mes mains ! Je l'aide à préparer à manger, et à nettoyer les chambres aussi. Et puis, je l'aide pour faire le ménage. Mais il ne veut pas que je fasse le service avec lui, il dit que c'est trop dangereux pour moi.
    - Alors, tu restes avec lui ?
    - Oui. Comme je travaille, il m'a donné une petite chambre, rien que pour moi, tu te rends compte ? Et je peux même manger autant que je veux !

    En observant mieux le gamin, un sourire attendri aux lèvres, Elland constate qu'en effet, il a pris un peu de poids. Rassuré, il se promet de remercier Pèire pour avoir pris soin de Ménandre. Une question lui taraude encore l'esprit, mais ses paupières sont si lourdes...

    Il est de retour dans la salle du Comain, ligoté à la longue table de bois. L'homme, au visage si sévère, est penché sur lui et sourit. Il sourit de toutes ses dents, comme s'il se délectait de la situation. Il tient amoureusement un long couteau de la main droite. Sa main gauche, glacée, s'est posée sur son flanc. Lentement, la lame s'approche de sa peau, l'effleure, le...

    Il se réveille en sursaut, couvert de sueur. Un homme est penché sur lui, une main glacée sur son flanc. Mais ce n'est pas le Comain. Un nez imposant, des joues bien rebondies, des yeux rieurs : tout en lui respire la joie de vivre. D'aucuns diraient qu'il est bon vivant, eu égard à sa fière bedaine qui fait bailler sa chemise blanche, et il se dégage de lui une telle aura de bienveillance qu'Elland se sent immédiatement en sécurité.
    La couverture est rabattue à hauteur de ses hanches, et dévoile une myriade de pansements de toutes tailles et de toutes formes. L'homme cesse de le palper pour l'interroger :


    - Ah ! Te voilà enfin réveillé, jeune homme ! Comment te sens-tu ?
    - J'ai mal.

    L'homme replet hoche doucement la tête, le sourire disparu, puis s'agite soudain. Il trottine jusqu'à la petite table où est posée une sacoche. Marmonnant pour lui-même, il en sort de nombreuses fioles. Dans un bol, il verse l'eau chaude contenue dans la bouilloire et y jette des feuilles et des pétales de fleur. Perplexe, Elland l'observe sans un mot. Puis les bras chargés, l'homme revient vers le convalescent :


    - Alors. Je vais d'abord te faire boire une infusion de coriandre et de pavot, pour apaiser la douleur.

    Avisant l'air méfiant du voleur, il lui apprend qu'il s'appelle Théoliste, et qu'il est médecin. Enfin, presque. Il n'a pas le droit d'exercer, car il faut avoir des appuis pour ce faire, mais il a l'habitude de soigner les plus démunis. Il lui explique que c'est Thémus qui l'a envoyé, et lui parle avec un air gourmand de l'hydromel qu'il va, parfois, boire chez lui.
    Tout en palabrant, il dépose précautionneusement les fioles sur le tabouret proche du lit. Rassuré par la simple mention du nom du cordonnier, Elland ne peut qu'acquiescer lorsque le presque-médecin lui propose à nouveau l'infusion. Alors avec précaution, il l'aide à se redresser, puis le fait boire à petites gorgées. Ensuite, il l''allonge à nouveau, bien calé sur les oreillers. Avec des gestes précis, il défait les bandages, lave les plaies avec une décoction d'absinthe, y applique des compresses de calendula pour les désinfecter et en améliorer la cicatrisation. Il appose des cataplasmes d'acanthe sur les brûlures et de la crème d'immortelle pour les hématomes.
    Il ne cesse de parler, pour expliquer les bienfaits des plantes, la compositions de ces remèdes, comme s'il cherchait encore à faire ses preuves. A demi-mot, il avoue à son patient qu'il a sérieusement craint pour sa vie car les plaies sont nombreuses et beaucoup étaient infectées. Elland souffre également de malnutrition et de déshydratation. Ménandre est d'ailleurs chargé de le faire boire abondamment. Pour le reste, Théoliste ne peut que lui conseiller de se reposer, longtemps, et de se ménager.

    Une fois pansé, le presque-médecin le recouvre de la couverture, le borde avec soin, puis s'affaire à ranger ses affaires. Déjà, les divers soins qu'il a effectués apaisent la douleur lancinante qui pulse de toute part. Le bonhomme jovial lui annonce alors qu'il doit partir, mais qu'il reviendra le lendemain, pour une visite de contrôle. De sa voix éraillée, Elland le remercie. Aussitôt, Théoliste s'immobilise, fouille dans sa sacoche, et en sort triomphalement une poignée de bonbons au miel, qu'il lui ordonne de sucer lentement. Puis il disparaît en trottinant.


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    Résumé :

     

    Anna Claramond ne se souvient plus de rien. Seul son nom lui est familier. La ville autour d’elle est blanche, belle, irréelle. Presque malgré elle, la jeune fille accepte l’aide du beau Wynter, l’héritier d’une puissante dynastie. Bal de rêve et cadeaux somptueux se succèdent avec lui mais Anna sent que quelque chose ne va pas. Qu’elle est en danger. De plus, des indices et des messages sont semés à son attention par l’insaisissable Masque, un fugitif recherché. Qui est son ennemi, qui est son ami ? Anna sait qu’elle doit se souvenir. Mais que lui réservera sa mémoire une fois retrouvée ?

     

    J'ai aimé

     

    Mon avis :

     

    Le quatrième de couverture en dit un peu trop, à mon goût. Car la perte de mémoire n'est pas totale, et on se doute bien vite que certaines choses sont étranges.

    Et pourtant, Fabrice Colin a su créé un monde magnifique, à la fois sombre, inquiétant, et plein de magie et de rêves. J'ai été très vite intriguée (c'était le but, d'ailleurs, je suppose). Au fur et à mesure que les pages se tournaient, j'échafaudais diverses théories, toutes plus farfelues les unes que les autres, et que je ne révèlerais pas ici, parce que bon, personne n'aime se tromper.

    Anna est un personnage attachant, même si elle est un peu agaçante parfois. Elle se laisse porter par certains évènements, alors qu'on lui crie de se méfier. Cela dit, à sa place, j'aurais sans doute fait la même chose.

    La plume de Fabrice Colin est vraiment très belle, remplie de sentiments et de magie poétique, ce qui donne au livre une atmosphère très prenante.

    Tous les personnages qui l'entourent ont leur particularité propre qui les rend attachants, surtout son majordome. Pour d'autres, on prend un plaisir pervers à les détester cordialement.

    A mesure que défilent les pages, les évènements s'accélèrent, le rythme s'emballe, les enjeux deviennent de plus en plus importants et il devient particulièrement difficile de lâcher le livre.

    La fin, que je ne révèlerais pas, m'a cependant quelque peu déçue. Sans doute parce que j'avais imaginé tant de choses que bon... La raison de ma déception est très personnelle mais voilà... C'est presque trop facile, en fait. Je ne parle pas de l'explication de cette situation, qui m'ouvre à de nouvelles idées sur le thème en question, et me permet de revoir ce que j'imaginais à ce propos (Voilà. Quand on essaie de garder un peu de suspens, on finit par faire des phrases parfaitement incompréhensibles). Mais plutôt de la raison pour laquelle elle est dans cette situation.

    Bref. Un livre tout à fait agréable à lire, dans un univers où tout est possible. Un excellent moment de lecture, même si la déception finale lui donne un léger arrière-goût amer.


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    Résumé :

     

    Nobody Owens est un petit garçon parfaitement normal. Ou plutôt, il serait parfaitement normal s’il n’avait pas grandi dans un cimetière, élevé par un couple de fantômes, protégé par Silas, un être étrange ni vivant ni mort, et ami intime d’une sorcière brûlée vive autrefois. Mais quelqu’un va attirer Nobody au-delà de l’enceinte protectrice du cimetière : le meurtrier qui cherche à l’éliminer depuis qu’il est bébé. Si tu savais, Nobody, comme le monde des vivants est dangereux…

     

    Coup de coeur

     

    Mon avis :

     

    Pour commencer, j'aimerais dire un mot sur le livre en lui-même : la couverture est vraiment très jolie, et à l'intérieur, il y a de nombreux dessins, qui donnent un ton tout à fait particulier au récit. Un gros coup de cœur pour cette originalité !

    Quant à l'histoire... Inutile de redire ce qui est expliqué dans le résumé. Les personnages sont tous vraiment attachants, à commencer à Nobody. Tous les personnages qui gravitent autour de lui ont leur histoire, leurs manies et leurs manières de parler qui les rendent vraiment … vivants.

    Bien que le surnaturel soit évidemment présent tout au long du récit, il est amené de telle manière que ça nous semble parfaitement évident et normal. La plume est simple, précise, et sert parfaitement le récit.

    On se laisse entraîner par ce conte des temps modernes et on suit les difficultés du jeune héros avec un plaisir certain. J'ai lu sur un blog, qui parlait de ce livre, que le récit fait un peu penser à du Tim Burton. Et en effet, en lisant, j'avais de nombreuses images Burtonniennes en tête.

    L'intrigue en elle-même, déjà originale à la base, est bien faite, ni trop compliquée, ni trop simpliste. Le charisme des personnages donne toute l'ampleur au roman. Et sans trop en dévoiler sur la fin, c'est un subtil mélange de tristesse et d'espoir qui m'a serré le cœur.

    Je crois bien que je ne verrais jamais plus les cimetières de la même manière.

    Un vrai coup de cœur, donc !


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  • Dehors-les-chiens-les-infideles-de-Maia-Mazaurett.jpg

     

     

    Résumé :

     

    Trois générations après la Grande Défaite des forces de la Lumière contre l’Occidan noir, les hommes ne connaissent plus qu’un monde privé de l’éclat du soleil. Tous les cinq ans, la Sainte Inquisition envoie cinq Quêteurs aux talents aussi complémentaires qu’aux tempéraments bien trempés, sillonner le continent à la recherche de l’Etoile du Matin, artefact mythique censé ramener la lumière sur le Monde…

     

    Coup de coeur

     

    Mon avis :

     

    Pas de suspens inutile : c'est un récit qui m'a marqué et qui m'a beaucoup plu.

    Nous suivons donc les Quêteurs dans leur recherche de ce qui pourrait sauver le monde des gentils. Dès le début du roman, nous sommes plongés dans l'action, et il devient difficile de reposer le livre.

    Chaque Quêteur a sa personnalité propre, ses talents particuliers qui le rend indispensable au reste de l'équipe. Ainsi, plusieurs d'entre eux ne savent pas lire, occasionnant un handicap certain (et ça nous fait réaliser à quel point nous avons la chance de pouvoir lire).

    Chaque personnage a ses côtés touchants, une motivation qui lui est propre et qui nous parle. Et même lorsqu'il s'agit de détester un personnage car il est trop extrémiste, on peut comprendre son point de vue.

    Dans ce monde, point de manichéisme : les gentils ne sont pas aussi gentils qu'il y parait, et les méchants, pas si méchants que ça, finalement.

    Il y est question de courage, d'honneur, de foi, d'intolérance (et pas seulement religieuse), de lutte de pouvoir et d'amour. Tout un panel de sentiments qui se mêlent parfaitement, sans tomber dans les clichés, sans nous faire froncer les sourcils.

    La question de la religion y est présente, fatalement, et l'auteur nous laisse tirer nos propres conclusions quant au comportement de ces partisans, sans prendre position.

    L'intrigue est parfaitement menée, et jusqu'aux dernières lignes, l'auteur nous réserve des surprises, pas forcément belles.

    C'est difficile d'en parler sans réveler l'intrigue. C'est réellement un roman prenant, qui fait réfléchir tout en nous permettant de nous évader.

    Un seul conseil : laissez-vous tenter !


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  • Ruelle--2-.jpg

     

    Un soir, comme d'habitude, les cerbères viennent le chercher. Il n'a plus la force de les supplier et sa voix s'est éteinte, usée par ses cris. Incapable de tenir sur ses jambes, ce sont les geôliers qui le traînent hors de la cellule, une main sous chaque aisselle. Mais ce soir-là, ils passent tout droit devant la salle du Comain. Elland se garde bien de s'en étonner, terrorisé à l'idée qu'ils inventent un nouveau moyen de le martyriser.
    Ils montent lentement les escaliers jusqu'à l'entrée de la prison, faisant cogner ses pieds traînants contre chaque marche puis contre chaque aspérité du sol inégal. Ce n'est qu'une fois hors de la prison, dans la rue déserte, que le plus jeune lui apprend qu'ils ont trouvé le coupable, le vrai cette fois, et qu'il doit rentrer chez lui pour oublier ce qu'il s'est passé. Ils dénouent ses entraves et l'emmènent jusque dans une ruelle adjacente : ça fait moins désordre que devant les geôles. Et ils le laissent là, plus mort que vif.

    Rentrer chez lui... Il grimace un sourire. Il lutte déjà pour lever la main, couverte de saleté et de sang, afin de la regarder, incrédule, vierge de toute entrave. La faible lueur de lune renforce l'aspect irréel de la situation. Libre. Il est libre. Il devrait ressentir une joie indicible, il est enfin lavé de tout soupçon. Mais il n'a plus vraiment la force de ressentir quoique ce soit. Se lever, avancer jusqu'à son immeuble. Grimper la façade. Se glisser à travers la lucarne. C'est tout simplement impensable. Echidna ! Elle pourrait peut-être l'aider... encore qu'il faudrait qu'elle entende son appel. Gisant sur les pavés glacés, il ferme les yeux, découragé.

    C'est alors qu'il entend un bruit d'ailes, puis un corps massif qui se pose non loin de lui. Ses lèvres gercées s'étirent dans un sourire douloureux. Il n'a pas la force d'ouvrir les yeux, mais il sait qu'elle est venue. Elle va le sauver. Elle lui donne un léger coup de nez, tiède et rugueux, sur la joue. Il gémit, incapable de parler ou de bouger, mais il veut lui faire savoir qu'il apprécie sa présence. Pour le coup, il espère qu'elle est perspicace.
    Avec la tendresse d'une mère, Echidna glisse ses pattes avant sous son corps supplicié. Il se sent quitter doucement les pavés et s'élever entre les hautes maisons. Rassuré, confiant, il s'abandonne à l'inconscience.

    Il n'ouvre pas tout de suite les yeux lorsqu'il reprend ses esprits. Sa première surprise est de se sentir enveloppé de chaleur. Il repose sur une surface douce et moelleuse. La puanteur de la paille moisie ne l'agresse pas. Alors lentement, ses paupières se soulèvent. Il est dans un lit. Un plafond aux poutres de bois apparentes est son unique paysage. Une lumière douce éclaire la pièce, provenant d'une simple fenêtre. Soudain, la douleur explose en des dizaines de parties de son corps et lui coupe le souffle. L'ignorer. Prétendre qu'elle n'existe pas le temps de découvrir où il est.
    Lentement, il tourne la tête sur la gauche, à la recherche d'indices. Une petite main émerge de la couverture, et il reste de longues minutes à l'observer. Qu'est-ce qu'elle fait là ? Est-elle sienne ? Comment le Comain aurait-il pu en réduire la taille ? Précautionneusement, il replie ses doigts contre la paume. La petite main n'a pas bougé. Soupir de soulagement.
    Alors seulement, il remarque la tignasse brune, posée sur le bord du matelas. Sous la tignasse, un visage mince, finement dessiné, des lèvres boudeuses. Ménandre ! Le gamin des rues s'est endormi, la main posée non loin de celle du voleur.

    Autour d'eux, la chambre est simple : le lit, une petite table accompagnée d'une chaise, un placard. Impersonnelle, c'est dans doute une pièce réservée aux visiteurs. A moins qu'il ne soit chez un médecin. Car sur la couverture, son bras gauche est bandé, et sa dextre, sous les draps, palpe de nombreux pansements sur son corps. Oui, il a été soigné, c'est certain.
    Lentement, il déplace sa main gauche, jusqu'à couvrir celle du gamin. Combien de temps l'a-t-il veillé avant de s'écrouler épuisé ? Comment a-t-il pu ...
    Sans même s'en apercevoir, il glisse dans l'inconscience.


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